More and more analysts strive to measure the environmental, social and governance (ESG) performance of companies for investors for two reasons: first, to help them redirect their investments towards companies needed for the transition towards a more sustainable economy, second, to help them better understand a company’s risks. There is no standardized definition of ESG performance, which is thus the product of analysts’ methodologies. Relying on qualitative research, I explore how analysts produce this performance, and their own professional identity, in interaction with financial norms and discourse. The interpretation of my findings through a theoretical framework inspired by Axel Honneth and Judith Butler reveals how analysts internalize and reproduce these norms that determine their professional recognition and the recognizability of their analyses, but that also produce a reified representation of the world. I contribute to the literature on accountability and on performativity.
Neoliberal capitalism establishes entrepreneurship, competition, and soft regulation as the panacea to societal problems. Combining pragmatic sociology and critical discourse analysis, we deconstruct how the Muhammad Yunus’ justification work relies on criticism to make these market-based solutions both legitimate and necessary. We highlight four types of justification work¬: authorizing, problematizing, imagining, and solutioning. We describe their related discursive strategies, framings of reality, and impacts on criticism. We thus refreshe the notion of test, revealing the power effects in justification work, and highlighting the mechanism of complex domination in neoliberal capitalism.
A ce jour, la littérature consacrée à la prise de décision dans les organisations démocratiques s’est focalisée avant tout sur leurs organes de gouvernance et processus formels. C’est vrai des études portant sur les organisations démocratiques traditionnelles telles que partis politiques, syndicats, coopératives et associations, axées sur l’activité des bureaux, conseils d’administration et assemblées générales. C’est vrai également des études portant sur les organisations apparentées à des mouvements sociaux telles que collectifs féministes et groupes d’affinité anarchistes, axées sur les processus de décision par consensus. Dans cet article, nous visons par conséquent à documenter la contribution jusqu’ici négligée de la communication informelle à la démocratie organisationnelle. Pour ce faire, nous mobilisons un cadre théorique pragmatiste – autour des notions d’enquête et de communauté d’enquête – et une méthodologie ethnographique et les appliquons à l’étude de Scopix, une coopérative de salariés caractérisée par un égalitarisme très appuyé. L’analyse des processus de décision entourant deux problématiques particulièrement sensibles pour les coopérateurs nous permet de montrer que : 1/ l’enquête est déclenchée par une atteinte perçue à l’égalité entre coopérateurs ; 2/ la progression de l’enquête passe par l’élargissement de la communauté d’enquête à l’ensemble des coopérateurs ainsi qu’à des personnes extérieures à la coopérative voire à des acteurs non-humains ; 3/ la clôture de l’enquête vient provisoirement verbaliser le rapport de forces entre les coalitions que l’enquête a fait émerger. En donnant à voir le rôle crucial joué par la communication informelle dans la prise de décision, nos résultats contribuent à offrir une compréhension de la démocratie organisationnelle plus équilibrée et fidèle à la réalité, telle qu’elle se pratique au quotidien.
Depuis quelques années, certaines organisations travaillent à changer leur mode de management pour privilégier l’autonomie des salariés. Cette notion fait débat dans la littérature en sciences de gestion. Nous travaillons ici sur la mise en place du management des équipes autonomes dans des organisations d’aide à domicile pour les personnes âgées. Si l’utopie trouve essentiellement son origine dans un monde imaginaire, nous nous interrogeons ici sur la place de l’imaginaire dirigeant dans la construction à des nouvelles pratiques de management, ici destinées, à une population qui a longtemps souffert d’un manque de reconnaissance important. En travaillant sur le monde de l’aide à domicile nous nous interrogeons notamment sur la particularité de manager des équipes soignantes et sur l’écart existant entre le monde dirigeant et le réel du travail des soignants. En explorant l’imaginaire dirigeant nous avons pour ambitions de comprendre les origines subjectives de la construction de cette utopie managériale de l’autonomie. Nous nous poserons différentes questions : Quels espoirs et quelles désillusions nourrissent les entrepreneurs en voulant poursuivre à tout prix une utopie organisationnelle ? En donnant l’espoir d’un ailleurs ? La mise en place d’un management centré sur l’autonomie ne peut-t-il trouvé sa place que dans l’utopie ? Quelles en sont les fonctions managériales ?
Les recherches en Critical Management Studies sur les organisations alternatives sont en plein développement, sous l’impulsion des discussions sur la performativité critique. Néanmoins, elles ont tendance à constituer le capitalisme comme seul point de référence pour une considération de l’alternativité (Dorion, 2017), omettant de prendre en compte un ensemble d’autres formes d’oppression et leur interconnectivité. En prenant pour exemple l’absence des questions animales en CMS, et appui sur la pensée écoféministe de Val Plumwood, nous développerons les raisons épistémiques qui puissent expliquer cette contingence et hiérarchisation des luttes sociales, aux implications fortes sur la constitution de ce champ de recherche et les choix de ses chercheurs. Ce travail montrera ainsi notamment la nécessité d’étendre la compréhension de l’alternatif à un ensemble de « nœuds d’oppression », et d’en considérer l’intersectionnalité d’un point de vue post-humaniste.
La mise en scène de soi fait partie intégrante de la vie en société. À cet égard, les interactions sociales en entreprise ne sont pas épargnées par les jeux de rôle, l’inauthenticité voire le mensonge. À la suite d’une étude qualitative préliminaire auprès de trente-cinq jeunes diplômés qui ont souligné l’absurdité liée à la facticité des relations de travail, nous avons décidé d’approfondir cette piste en élargissant la population analysée. Dès lors, nous avons mené vingt nouveaux entretiens semi-directifs auprès de deux groupes d’individus : à la fois des jeunes diplômés disposant d’une expérience limitée en entreprise et des salariés avec une ancienneté et un recul plus importants. Nos résultats évoquent une mise en scène qui s’étend sur tout le parcours de socialisation de l’individu en entreprise. Ils mettent en lumière à la fois la façon dont les salariés revêtent ou se libèrent de costumes prototypiques associés à leur rôle professionnel et les palettes du jeu de rôle allant du respect de la bienséance au mensonge pur et simple. Si cette recherche constate que le monde du travail peut s’apparenter à un bal « masqué », certains masques semblent particulièrement prisés sur la scène professionnelle.
In this paper, we are interested in peasant knowledge sharing within counter-hegemonic networks or meta-organizations in agriculture. Peasant knowledge is considered by these organizations as a part of Commons to be preserved, managed and shared. However, counter-hegemonic movements face challenges when it comes to decision making, conflicts or disagreements, particularly in the context of hegemonic struggles where they are to defend their assets and practices against the hegemonic project of industrial agriculture.
We are interested in the question of how alternative organizations might use digital technologies as a tool to share peasant knowledge in their commons management policy, in the particular context of a counter-hegemonic movement. Our research question therefore focuses on the potential of digital use to develop the agro-ecological model, particularly in terms of knowledge commons sharing, aimed at supporting small farmers and producers, with particular attention to the risks that might be associated with such use.
Les organisations alternatives du secteur des énergies renouvelables (EnR) nouent des relations inter-organisationnelles complexes notamment entre des réseaux de coopératives de production et de distribution. Une véritable chaîne de valeur d’EnR alternative et citoyenne, se dessine à l’échelle territoriale dont les contours se délinéent, pour adresser une mission sociétale de transition énergétique. Les logiques historico-politiques du marché de l’énergie additionnées aux enjeux climatiques pressants, vont contraindre ces coopératives à se structurer à de plus larges échelles. Encastrées dans un système régi par des mécanismes marchands et un maillage organisationnel multiniveaux, elles managent une tension dominante de passage à l’échelle. Pourtant, nous savons peu de choses sur le management des tensions intra- et interorganisationnelles dans ce processus de passage à l’échelle. Pour les étudier, nous mobiliserons l’approche par les tensions au sein des organisations alternatives comme grille de lecture des enjeux de montée en échelle. Nous l’articulerons aux apports théoriques processuels de la sociologie de la traduction appliqués à une étude de cas imbriqués d’un réseau de coopérative de production d’EnR. Cet ancrage théorique a permis d’identifier dans un premier axe, la nature des tensions de passage à l’échelle expérimentées par ces organisations alternatives pour caractériser dans un deuxième axe, les composantes du processus de traduction à l’œuvre.
Dans Les Politiques de l’Enquête (Fassin & Bensa, 2008) plusieurs réflexions sont proposées sur la manière dont le genre de l’enquêteur, ses préjugés, ses émotions, ses engagements influent sur la compréhension des sociétés ou des mondes sociaux. Du côté du terrain aussi, les attentes, les exigences ou les contestations de ceux qui font l’objet des enquêtes informent ou transforment le savoir anthropologique, sociologique (Fassin & Bensa, 2008) et gestionnaire. Qu’en est-il alors lorsque le chercheur ne parvient pas à rencontrer directement les acteurs qu’il avait positionné au cœur de sa question de recherche et donc qui font l’objet de son enquête ?
C’est comme si, avant d’achever sa recherche, le chercheur s’était tout le temps demandé « dans quelles mesures les meneurs de projet d’utilisation de la blockchain pour la transparence des filières alimentaires augmentent le pouvoir exercé sur les agriculteurs ? » mais qu’il se rend compte finalement que la question posée n’est pas la bonne ou en tout cas, insuffisamment englobante.
Le principal résultat obtenu est que certains acteurs de l’agroalimentaire souhaitent mener des projets de transparence à l’aide de la blockchain et accroissent leur pouvoir dans les filières voire font émerger un pouvoir pour d’autres acteurs, comme les fournisseurs de la technologie.