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Buton Adeline

Le business model (BM, ou modèle d’affaires) est une notion désormais populaire, mais qui comporte de nombreuses zones d'ombre. Sa dimension systémique et son objectif de génération et captation de valeur semblent faire consensus. En revanche, sa construction et son évolution restent largement débattus. La nature que l’on attribue au BM explique en partie les ambiguïtés qui planent sur la question. En choisissant de voir le business model comme un artefact plutôt que comme un simple outil cognitif et communicationnel, nous nous intéressons à ce thème en l’abordant sous un angle relativement original. Nous travaillons sur la problématique suivante : quels facteurs internes et/ou externes peuvent influencer la trajectoire d’un modèle d’affaires ? Une revue de littérature nous permet de percevoir les caractéristiques et les intérêts attribués à la notion du business model, mais aussi d’aboutir à notre propre cadre conceptuel. Celui-ci s’attache à identifier les sept composantes constitutives de ce système, séparées selon deux blocs : les composantes « fonctionnelles » et les composantes « génératrices de valeur ». En nous appuyant sur les articles académiques étudiés, mais aussi en nous positionnant, nous nous focalisons sur la place réservée à la stratégie : nous lui attribuons une définition Porterienne et nous en faisons une composante du BM. Nous nous appuyons aussi sur une piste évoquée par Demil et al. (2015) pour rapprocher les concepts de stratégie et de BM des notions de stratégies planifiées, émergentes et réalisées. Enfin, nous utilisons la littérature afin d’identifier des causes potentielles d’évolution du BM. Les travaux de Martins et al. (2015) notamment nous amènent à envisager des causes exogènes (l’environnement) mais aussi endogènes aux modifications de modèle d’affaires. Parmi les facteurs internes, nous répertorions la stratégie et l’histoire de l’entreprise (mobilisant de fait la notion de sentier de dépendance). Pour répondre à notre problématique, nous nous appuyons sur une étude empirique basée sur une série d’études de cas. Tous les cas sélectionnés gravitent dans un même environnement, le secteur du livre numérique en France. Toutefois, nous avons souhaité mettre en place une réplication théorique. Nous avons ainsi fait varier deux paramètres : la date d’entrée des entreprises sur le marché de l’eBook, et leur positionnement initial. Notre analyse se base sur quatre stratégies visant à donner du sens (Langley, 1999) : la narration, la cartographie (qui aboutit à des chaînes causales représentant des séquences d’incidents), la quantification et une technique analytique itérative. La quantification s’est faite à l’aide de bitmaps, articulées autour de la composante stratégique identifiée au sein des chaînes causales. Nous observons que les autres composantes du BM impactent la stratégie dans près de 60% des chaînes causales identifiées, et que la stratégie mobilisée donne lieu à un changement de BM quasi-systématiquement. Le sentier de dépendance impacte moins souvent la stratégie que l’ensemble des autres composantes du BM, mais il est plus déterminant lorsqu’il touche la stratégie. L’environnement impacte lui aussi moins souvent la stratégie que l’ensemble des autres composantes du BM, mais nous n’avons pas pu analyser l’intensité de son influence.

Buton Adeline, Corbel Pascal

Nous proposons une approche renouvelée de la problématique classique de l’avantage du pionnier en nous appuyant sur les théories récentes de l’entrepreneuriat. En basculant d’une logique implicite de prise de décision selon des modèles classiques de cause à effet pour introduire le concept d’effectuation, nous aboutissons à une approche donnant toute sa place aux tâtonnements du pionnier. Une étude de cas approfondie sur l’un des pionniers du livre numérique en France nous permet d’avancer un certain nombre d’implications susceptibles selon nous d’enrichir le corpus de connaissances sur l’avantage du pionnier. Ainsi, dans le cas de Numilog, si le point de départ de la création de l’entreprise peut s’analyser dans une logique causale classique, ses diversifications connexes successives, s’analysent mieux dans une logique d’effectuation. Cela n’est pas sans conséquence car si l’entreprise réunit effectivement un portefeuille de ressources et compétences complémentaires qui ont permis d’assurer sa survie pendant 17 ans (cas très rare parmi les pionniers du livre numérique), cette grande diversité de métiers opérés à partir d’une base de ressources très limitée la fragilise également, tant sur le plan stratégique (pas d’avantage concurrentiel significatif) que financier. Cette étude de cas nous permet également d’alimenter la littérature émergente sur l’effectuation, notamment en montrant que l’approche effectuale peut aussi apparaître postérieurement à une approche causale plus classique.