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Walas Aurélie, Walas Muriel, Scotto Philippe

Ce papier conceptualise la philanthropie d’entreprise comme un outil de maintien de la légitimité et l’explore dans le cas des Caisses d’Épargne. Cette exploration soulève des variables fondamentales (NTIC, logiques d’efficience…) qui challengent la philanthropie des Caisses d’Épargne et mettent sous tension leur légitimité (Deegan, 2006 ; Guthrie et Parker, 1989 ; Brown et Deegan, 1998 ; Djelic, 1998 ; Campbell, 2007 ; Lim et Tsutsui, 2012). La philanthropie d’entreprise comprend les dons financiers et en compétence, les produits partage, les partenariats sociaux et les logiques inclusives « Bottom of the Pyramid » (BOP) (Gautier et Pache, 2015 ; Varadarajan et Menon, 1988 ; Seitanidi et Ryan, 2007 ; Prahalad, 2006). Elle est une pratique de RSE socialement désirable (Carroll, 1991). La théorie de la légitimité stipule une plus grande communication sur la RSE suite à une menace de délégitimation (Deegan, 2006 ; Guthrie et Parker, 1989 ; Brown et Deegan, 1998). Nous concevons au contraire la philanthropie d’entreprise comme un outil de maintien de la légitimité de l’entreprise, en la protégeant du risque de délégitimation lors d’une attaque. Un tel maintien est stratégique, la légitimité étant plus difficile à acquérir ou à restaurer qu’à maintenir (Suchman, 1995). Ce maintien est nécessaire à la survie de l’entreprise, car il lui garantit une autorisation légale et sociale à opérer ses activités (Suchman, 1995 ; Fasterling et Demuinjck, 2016 ; Wilburn et Wilburn, 2011). Cette proposition est explorée dans le cas unique des Caisses d’Épargne (Yin, 1989) et dans le cadre d’un nouveau rapport à l’information et aux valeurs (Lipovetsky, 1992). Le rapport se caractérise par la démocratisation, la facilitation et l’accélération de l’accès à l’information ainsi qu’à la production de son contenu et à sa diffusion (Bateson, 1973, 1996 ; Morin, 1973, 1977 ; Comberousse, 1999 ; Shank et Dewald, 2003 ; Zhou, 2003). Le rapport aux valeurs, plus contextuel et intégrateur des générations futures, fait évoluer le construit d’intérêt général vers celui de développement durable et vers le construit plus pragmatique d’efficacité sociale (Engels, Hély, Peyrin et Trouvé, 2006 ; Jonas, 1995 ; Lipovetsky, 1992). Les analyses contextuelle et structurelle (Godet, 1997) montrent un emploi de la philanthropie de l’entreprise comme un outil de maintien de la légitimité, par des dynamiques différenciées de légitimation pragmatique, morale et cognitive. Huit propositions de recherche sont élaborées à partir de ces résultats exploratoires, et proposées en voies de recherche. La légitimation par la philanthropie d’entreprise des Caisses d’Épargne s’exprime au travers d’un processus différencié de légitimation pragmatique par conformité aux attentes d’efficacité sociale des Français, de légitimation morale par conformité aux valeurs humanistes, et de légitimation cognitive par diffusion d’une culture philanthropique d’épargne populaire, d’utilité publique, de proximité et d’inclusion. Nous mettons en évidence que les facteurs qui influencent le plus la légitimation par la philanthropie des Caisses d’Épargne sont les nouvelles technologies de l’information et des communications (NTIC) et les logiques d’efficience. Il apparait stratégique pour la légitimité des Caisses d’Épargne de poursuivre l’emploi des NTIC dans la démonstration de leur efficacité sociale et la modernisation de leur culture d’épargne populaire, aujourd’hui opérée par le Livret A Connecter, Espace Don et le développement de l’omnicanal.