AIMS

Index des auteurs > Roussat Christine

Rouquet Aurélien, Roussat Christine

L’essor de l’économie collaborative et de ses entreprises (AirBnB, Blablacar, Uber, etc.) remet actuellement en cause les équilibres concurrentiels au sein de nombreux secteurs de l’économie traditionnelle. Uber a ainsi donné lieu à la naissance du néologisme « d’uberisation » qualifiant le processus par lequel un secteur est bouleversé par l’arrivée d’un dispositif collaboratif matérialisé par une ou plusieurs start-up. Alors qu’elle fait partie des secteurs identifiés comme les plus prometteurs pour l’économie collaborative, l’industrie de la prestation logistique n’a pas encore été réellement ubérisée. Depuis quelques années, on voit toutefois émerger de multiples initiatives de crowd logistics, qui proposent de recourir à la foule pour transporter un colis à l’international, stocker des encombrants, assurer une distribution physique de proximité. Ces initiatives procèdent de start-ups américaines (Postmates, Instacart) ou européennes (Stuart, Nestor), d’acteurs établis de l’économie collaborative (Ubereats) voire des prestataires logistiques traditionnels eux-mêmes (myways de DHL). Alors que les aspects logistiques, bien qu’étant de plus en plus stratégiques, sont négligés dans la littérature émergente sur l’économie collaborative, l’objectif de cette recherche est alors de mieux comprendre les logiques d’insertion de ces nouveaux acteurs de la crowd logistics dans les chaines logistiques existantes. Pour cela, nous analysons ici le cas des entreprises de crod logistics qui proposent des offres de livraison urbaine du dernier kilomètre. Cet ultime maillon est en effet selon les professionnels du secteur le plus à même d’être impacté par les processus collaboratifs et a vu se développer de très nombreuses entreprises dernièrement. A partir de l’étude approfondie des sites Internet d’une trentaine de cas d’entreprises de crowd delivery, notre recherche met ainsi en évidence qu’il existe chez ces acteurs trois grandes logiques types d’intégration. La première logique consiste à se présenter comme un prestataire de service visant à enrichir l’offre logistique des distributeurs existants, en leur proposant un service de livraison. La seconde logique consiste à se penser comme un distributeur urbain en ligne qui offre la possibilité aux consommateurs d’une ville de se faire livrer les produits qu’ils souhaitent depuis un échantillon de fournisseurs. La troisième logique consiste pour les entreprises à développer en interne un système de livraison collaborative externalisée à la foule afin de distribuer par ce biais l’offre de l’entreprise. Au final, sur le plan théorique, nos résultats permettent de mieux conceptualiser la dynamique stratégique d’intégration des entreprises de la crowd delivery au sein des chaînes logistiques Sur un plan managérial, ils sont utiles afin de faire des recommandations aux entreprises de la crowd delivery ainsi qu’aux différents acteurs des chaînes logistiques que celles-ci peuvent concurrencer (prestataires de services, distributeurs, producteurs).