Cet essai s’intéresse aux tensions entre industrie et création de mode au travers de la (dé)valorisation d’une ressource spécifique, celle des « matières ». Il étudie la mise à distance qui s’est opérée et qui en a fait des ressources ordinaires délaissées, au sens où leur invisibilité stratégique est venue dégrader à la fois la performance et la légitimité du système mode. Sont mis en regard trois processus qui portent à l’inverse un potentiel de revalorisation du cycle matières. L’article invite à remonter la filière, non pas pour revenir à des questions matérielles mais pour créer l’opportunité d’un dialogue et de solidarités renouvelés entre les acteurs de la filière, industriels et créatifs. « La filière qui n’existait pas » est celle qui repense les imaginaires industriels pour un nouveau souffle créatif, qui accompagne la transformation des stratégies organisationnelles et inter-organisationnelles vers des collectifs qui font sens. Des perspectives de recherche sont identifiées afin d’accompagner l’élaboration d’une gestion renouvelée des matières au sein de la filière.