AIMS

ST-AIMS 12 : Valeur des ressources, création de valeur(s) et Business Model

 

 

 

Responsables

 

Xavier Weppe (Université de Lille, IAE, LUMEN) –  xavier.weppe@univ-lille.fr

Vanessa Warnier (Université de Lille, IAE, LUMEN) –  vanessa.warnier@univ-lille.fr

Marie Joachim (ESSCA École de Management, campus de Paris) –  Marie.joachim@essca.fr

Guillaume Do Vale (IDRAC Business School, campus de Lyon) – guillaume.dovale@ecoles-idrac.com.

Romain Gandia (Université Savoie Mont Blanc, IREGE) - romain.gandia@univ-smb.fr

 

Mots-clés : business model –architecture de valeur- valeur(s)– ressources- valorisation – grand challenges

Cette session thématique est portée par le GT « Valorisation des ressources et des compétences, et business models ».

La crise de l’énergie que nous vivons depuis plusieurs mois ainsi que les impacts du changement climatique sont en train de balayer les illusions naïves de ressources infinies pouvant alimenter les business model d’aujourd’hui et de demain. Dans de nombreux secteurs, les dirigeants font, ou vont, rapidement faire face à une pénurie de matières premières, ou de matériaux, les amenant à faire évoluer leurs circuits d’approvisionnement voire leur business model. Dans un monde caractérisé par la finitude de ressources, il est intéressant de comprendre comment ces nouvelles contraintes sont prises en compte dans la transformation des business models. Les recherches sur les business models circulaires (Kevin van Langen & al., 2021) ou les business models de l’upcycling peuvent y contribuer, mais la mobilisation de cadres théoriques plus anciens comme la théorie de la dépendance des ressources (Pfeffer & Salancik) peut aussi apporter un éclairage nouveau sur les relations entre les entreprises et leur environnement à l’ère de l’anthropocène.

Dans le même temps, l’évolution des technologies numériques a fait émerger de nouveaux gisements de ressources jusqu’alors non identifiées ou non captées par les entreprises en ouvrant l’accès à certaines ressources (les chambres inoccupées des logements pour Airbnb, les espaces vides des voitures pour Blablacar, les outils non utilisés pour Allovoisins, etc.). Ces évolutions technologiques et la diffusion des modèles de plateforme ont créé de nouvelles opportunités qui conduisent les entreprises à développer de nouvelles pratiques de création, capture et partage de la valeur. Ces business models de plateforme de l’économie numérique ne cherchent plus à détenir en interne quelques actifs stratégiques mais font plutôt le choix de valoriser une masse de ressources ordinaires disponibles dans l’écosystème de l’entreprise (Frery & al., 2015). L’émergence des communautés en ligne autonomes, par exemple, questionnent leur impact sur la valeur créée pour les utilisateurs qui échappent parfois aux entreprises (Mein Goh et al., 2016). Au niveau du business model, ce changement de vision est crucial car il suppose le développement de stratégies centrées sur l’accès et le contrôle de ressources externes plutôt que sur leur appropriation et leur préservation. Les mécanismes de création de valeur peuvent alors subir d’importantes refontes, tout comme la proposition et la capture de valeur (Appleyard & Chesbrough, 2017).

Les entreprises font donc face désormais à nouvelle complexité. La révolution numérique leur a ouvert un nouveau champ des possibles en favorisant l’accès à une multitude de nouvelles ressources en dehors des frontières de l’entreprise mais dans le même temps d’autres ressources se raréfient ou deviennent de plus en plus difficiles à utiliser en raison de contraintes réglementaires croissantes (énergies non autorisées, interdiction de certains matériaux, etc.). Cette nouvelle complexité pose la question de l’accès aux ressources et à la façon dont les organisations les mobilisent pour créer de la valeur.

Les grands défis environnementaux, sociaux et sociétaux (Brammer & al., 2019) qui s’imposent aujourd’hui aux organisations les amènent donc à concevoir des réponses stratégiques et organisationnelles innovantes à de nouvelles problématiques d’accès aux ressources. Elles doivent ainsi renouveler leur manière de percevoir les ressources, leurs usages, et les processus organisationnels permettant la création et la capture de valeur. Dans de nombreux secteurs (mode, agroalimentaire, bâtiment, design), de plus en plus d’entreprises se mettent à valoriser des « co-produits » et inventent des business models et des pratiques de management des ressources capables de créer de la valeur à partir de « déchets », d’objets, de matières, de matériaux délaissés jusqu’alors perçus comme inutiles. Elles réalisent ainsi une double voire une triple création de valeur : valeur économique, environnementale, et sociétale.

D’un point de vue académique, explorer ces initiatives conduit à déplacer l’attention des chercheurs sur des ressources peu étudiées par la majorité des travaux mobilisant l’approche ressources et compétences en stratégie. Une observation plus approfondie des pratiques managériales de valorisation des ressources, de capture et de partage de ces valeurs produites par le BM devient nécessaire et questionne les fondements de l’approche ressources. Sa conception implicite et réductrice de la valeur est notamment remise en cause. Face à ces limites, les travaux sur les réponses stratégiques aux « grand challenges » (Hamann & al., 2020) ou la littérature sur les « Sustainable business model » (Schaltegger et al., 2016; Stubbs & Cocklin, 2008) constituent des pistes de réflexion intéressantes. Toutefois, comme le souligne Laasch (2018), la logique de valeur principale du Business Model est souvent plutôt de nature commerciale, et il n’existe pas encore de cadre d’analyse permettant de prendre en considération les différentes valeurs créées simultanément pour les différentes parties prenantes. Ainsi, Schneider & Clauß, (2020) considèrent qu’un des enjeux principaux à venir de la recherche sur les BMs est une meilleure connaissance des interactions entre les processus de création de valeur économique, environnementale et sociétale.

Pour explorer ces perspectives, nous proposons de croiser les approches ressources et compétences et Business model (Demil & al., 2018 ; Lecocq & al., 2010) avec la littérature de plus en plus abondante sur les « Grand challenges ». L’étude des nouvelles formes de valeur, des nouvelles architectures de valeur et processus de valorisation accompagnant la prise en compte des challenges par les organisations peut s’envisager de différentes manières :

Une première voie interroge la nature de la valeur et des ressources qui permettent sa génération. Les organisations génèrent-elles de nouvelles formes de valeurs pour de nouvelles parties prenantes ? Comment les problématiques d’accès aux ressources (abondance ou pénurie) les amènent-elles à reconsidérer leurs ressources ou leurs besoins en ressources ?

Une deuxième voie peut analyser les processus de management des ressources permettant de créer de la valeur économique, sociale et environnementale. Assistons-nous à une transformation des processus de valorisation de ressources largement disponibles ou délaissées ? S’il semble évident aujourd’hui que les ressources ne peuvent plus uniquement être appréciées à travers leur seule valeur économique, autrement dit leur productivité, nous manquons de travaux permettant de comprendre comment les différentes formes de valeur interagissent.

Enfin, une troisième voie peut s’intéresser à la manière dont les organisations repensent leur architecture de valeur dans un contexte de Grand Challenges ? Quelles sont les conditions nécessaires à la mise en œuvre de ces nouvelles architectures de valeurs (antécédents, leviers et freins).

Les contributions attendues

Cette STAIMS est ouverte à tous types d’approches théoriques, épistémologiques, et méthodologiques. Dans le cadre de cette session thématique, nous sommes d’ailleurs intéressés par les recherches donnant à voir des pratiques développées par les managers pour prendre en compte la variété des formes de valeur, pour créer de la valeur à partir de ressources stratégiques ou « non stratégiques ».

Plusieurs questions semblent particulièrement intéressantes, sans être exclusives :

  • Quelles sont les nouvelles valeurs qu’intègrent les organisations dans leur stratégie pour répondre aux Grand challenges ?
  • Dans un contexte de contraintes de ressources de plus en plus pressantes, comment les organisations réinventent-elles leur architecture de valeur (i.e. leurs BM) et les ressources associées ? 
  • Comment repenser la valeur dans les business models circulaires ?
  • Comment les managers reconfigurent-ils leurs BM lorsque les principales ressources de leur organisation perdent de la valeur ?
  • Comment les nouvelles technologies permettent-elles de valoriser des ressources ?
  • Comment les entreprises arrivent-elles à reconfigurer leur organisation pour créer de la valeur avec leurs clients ?
  • Comment certaines organisations arrivent-elles à développer un business model créateur de valeur à partir d’une masse de ressources ordinaires (Fréry, Lecocq & Warnier, 2015) ?
  • Comment des entrepreneurs façonnent-ils un business model créateur de valeur économique et sociale à partir de ressources négativement perçues par les autres acteurs du champ (Warnier & Weppe, 2019) ?
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