AIMS

ST-AIMS 01 : Acteurs, processus et pratiques de la transformation organisationnelle

 

 

Responsables

 Guillaume Carton (emlyon business school) – carton@em-lyon.com

Patrick Besson (emlyon business school) – pbesson@em-lyon.com

Alexander Alexiev (ESSCA School of Management) – Alexander.ALEXIEV@essca.fr

 

 

Mots-clés : transformation organisationnelle – direction générale – pratiques – processus – acteurs.

La transformation organisationnelle est un phénomène stratégique majeur. La presse économique en rend compte quotidiennement : la création de Stellantis, la renationalisation d’EDF, ou encore les recentrages stratégiques violents de Veolia-Suez, Danone, Renault, pour ne nommer que quelques entreprises qui ont défrayé la chronique. Les marchés financiers réagissent systématiquement, positivement ou négativement, à toute annonce d’une initiative de transformation par une entreprise.

La recherche académique montre que ce phénomène de transformation organisationnelle prend un rôle prépondérant depuis une vingtaine d’années (Besson, 2007 ; Besson et al., 2011; Besson & Rowe, 2011, 2012). Il s’accélère et s’amplifie tant se transformer est devenu un impératif stratégique. Toute communication d’entreprise y fait maintenant référence. Au cœur de ce processus, on retrouve des acteurs et des pratiques spécifiques que cette ST-AIMS appelle à étudier dans le cadre de la XXXIIème conférence annuelle de l’AIMS.

Parmi les acteurs de la transformation, on retrouve en premier lieu le groupe de direction (conseil d’administration, comité exécutif, vice-présidents, parties prenantes externes), ou Top Management Group. Il a un rôle central dans les transformations organisationnelles (Hambrick, 1994). Épistémologiquement, il est important de mettre le groupe de direction à l’origine de la conception et de la conduite des transformations. Cela permet d’éviter toute réification (les structures, les outils, le digital) et pour ne pas survaloriser naïvement le rôle des acteurs non-membres du groupe de direction. Le groupe de direction est composé du comité exécutif qui dirige les transformations (Besson, 2007 ; Kotter, 1995 ; Tichy, 1983). Les dirigeants font la différence, pour le meilleur ou pour le pire, surtout en période de transformation. Le groupe de direction est également constitué du conseil d’administration qui est le garant des transformations organisationnelles (Boivie et al., 2021 ; Westphal & Fredrickson, 2001). Enfin, les différents conseillers internes ou externes à l’organisation (Alexiev et al., 2010) font également partie de la constellation des individus au cœur des décisions stratégiques (Ma & Seidl, 2018).

Dans la ligne de la théorie des Upper Echelons (Hambrick & Mason, 1984), la recherche académique a produit de nombreuses recherches sur ces acteurs, notamment sur leur démographie et leur composition (Carpenter et al., 2004 ; Finkelstein & Hambrick, 1996). Mieux comprendre le rôle porté par les acteurs du groupe de direction dans la transformation organisationnelle invite à se focaliser sur comment ils délibèrent et s’organisent pour concevoir et conduire les transformations organisationnelles : que font-ils pendant une transformation organisationnelle ? qui discute avec qui ? comment s’organisent-ils pour le faire ? dans quelles instances les discussions se déroulent-elles ? Que se passe-t-il dans le kitchen cabinet (Frisch, 2011) ? En situation de transformation, comment se construit la relation entre le conseil d’administration et le comité exécutif (voir notamment Boivie et al., 2021; Luciano et al., 2020) ?

D’autres acteurs participent également aux transformations organisationnelles. Les managers intermédiaires (middle-managers) sont en charge de leur exécution et mise en place dans les organisations (Weiser et al., 2020). Ils le font en lien avec la direction générale à qui ils « vendent » les problématiques rencontrées auprès du terrain (Dutton & Ashford, 1993) et l’aide dans les prises de décision (Raes et al., 2011). Ils ont également un rôle central pour donner du sens à la transformation en cours (Gioia & Chittipeddi, 1991). Ils sont aidés de consultants qui sont en charge de mettre en place la transformation (Pettigrew, 1985).

La recherche portant sur les pratiques et rôles des managers intermédiaires et des consultants est plus importante que celle portant sur le groupe de direction. Il n’empêche qu’il reste à ce sujet de nombreuses interrogations. En effet, tandis que la littérature s’est beaucoup penchée sur leur rôle dans la dynamique organisationnelle, elle reste plus floue sur leur capacité à porter le changement en situation de transformation organisationnelle, de nature violente, comme les exemples d’entreprises évoqués plus haut l’ont montré. Comment ces acteurs participent-ils à faire sortir l’organisation de son inertie afin de créer la transformation organisationnelle (Besson & Rowe, 2012) ? Quel est leur lien avec le groupe de direction durant ces « épisodes stratégiques » ?

Un deuxième volet de cet appel à communication vise à s’intéresser au processus de transformation. La littérature montre qu’il existe différents types de transformation organisationnelle, qu’on peut par exemple distinguer par leur niveau de radicalité (Gersick, 1991). Dans ce cadre-là, et donc suivant la transformation à l’œuvre, il semble intéressant d’interroger le processus par lequel la transformation a lieu. Par exemple, quel est le rôle du contexte qui mène à des transformations organisationnelles ?, que ce soit des crises externes comme les crises financières (Dowell et al., 2011) ou les crises sanitaires (Wenzel et al., 2021) ou des crises internes comme le montrent les exemples évoqués dans ce début d’appel à communication (endettement, retards de production, éviction du dirigeant, mais aussi grèves, échec d’un produit, retrait d’un pays…). À quel moment du processus de transformation le groupe de direction, les managers intermédiaires et les consultants interviennent-il ? Qu’y font-ils (cf. Withers et al., 2012) ? Quels sont les liens entre les différents niveaux organisationnels pendant une transformation (environnement, organisation, groupe de direction) ?

Enfin, il semble intéressant d’observer les pratiques à l’œuvre lors des transformations. On peut par exemple penser aux changements des membres de la direction générale, notamment du dirigeant, qui ont lieu durant les transformations (Virany et al., 1992 ; Wiersema & Bantel, 1993), aux mécanismes de prise de décision (Eisenhardt & Zbaracki, 1992), aux choix d’allocation de ressources (Tushman & O’Reilly III, 1996), à la mobilisation de certaines parties prenantes externes, etc. On peut également penser à l’étude des pratiques de communication mises en place par les groupes de direction aux moments charnières de changement (communication auprès des parties prenantes – actionnaires, employés, clients… –, réunions de comités de direction élargies de type top 100, etc.).

Dans cet appel à communication sont particulièrement valorisées les étude de cas qualitatives qui permettent de contextualiser la transformation en cours, notamment les études de cas longitudinales (Doz & Wilson, 2017 ; Pettigrew, 1985) ainsi que les approches multi-niveaux (Mintzberg & Waters, 1982). La collecte de données primaires, que ce soit par ethnographie, shadowing, entretiens, etc., est également favorisée (e.g., Harvey et al., 2017). Il y a en effet un véritable enjeu empirique pour faire avancer la connaissance sur ce phénomène majeur de la transformation.

Enfin, la compréhension de la transformation organisationnelle peut reposer sur différentes théories, que ce soit des approches plutôt sociologiques (sociologie du pouvoir par exemple), des théories de la transformation organisationnelle (e.g., théorie de l’équilibre ponctué, écologie des populations, capacités dynamiques, etc.) (Besson & Rowe, 2011 ; Rowe et al., 2017) ou les théories habituellement mobilisées pour la compréhension du fonctionnement des groupes de directions (upper echelon theory, théorie positive de l’agence, théorie comportementale de la firme, etc.).

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