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Lussier Sacha

Longtemps, les établissements d'enseignement supérieur ont évolué dans un espace et un contexte local s'inscrivant dans un système national d'éducation (Maringe et Foskett, 2010). Leurs missions étaient donc influencées en grande partie par les politiques d'un gouvernement qui défendait la culture et l’histoire d’une nation. Un pays qui pensait et communiquait dans une langue souvent différente de celle utilisée par les nations voisines. Aujourd'hui, tout a changé. Le monde cherche à aplanir les différences et à créer une multitude de ponts entre les différentes cultures, mais en même temps que les pays s’uniformisent, une force contraire « locale » est à l’origine d’une nouvelle tension (Maringe, 2010). Se dessine ainsi un nouveau tournant qui était encore insoupçonnable il y a quelques décennies à peine. De nos jours, combinant les technologies à la globalisation, l'éducation ne respecte plus les frontières jadis dessinées (Sharkey et Beeman, 2008 ; Maringe, 2010 ; Wildavsky, 2010 ; Salmi, 2009). Dorénavant, les rétablissements d’enseignement doivent faire face à une concurrence mondiale. Il suffit de penser aux étudiants internationaux qui chaque année s’envolent par centaines de milliers vers l'Europe, les Amériques ou l’Australie et vont de plus en plus vers les pays asiatiques comme la Chine et l’Inde (Wildavsky, 2010). Si cette ouverture des frontières agrandit le territoire des marchés accessibles, elle expose l’institution d’enseignement à une multitude de concurrents totalement nouveaux (AACSB, 2011). Malgré tout, l'internationalisation est habituellement vue par les établissements d’enseignement supérieur de gestion, comme une possibilité d'élargir leurs influences et leurs services au sein de la communauté à laquelle elles appartiennent en mettant sur pieds des partenariats qui permettront à la fois une mobilité accrue de leurs étudiants et enseignants-chercheurs, et une meilleure réputation internationale afin d'attirer les meilleurs étudiants, voire les meilleurs enseignants (AACSB, 2011). Toutes ces transformations ont eu un impact sur l’évolution des sciences de gestion et du métier d’enseignant-chercheur en gestion. L'objet de cette communication sera de mieux comprendre le cadre dans lequel évoluent désormais les enseignants chercheurs en gestion. Pour ce faire, après avoir rappelé dans un premier temps les divers aspects de cette internationalisation de l’éducation, notamment par le biais des accréditations (EQUIS, AACSB et AMBA) et des classements internationaux, nous verrons comment les établissements d’enseignement supérieur de gestion accordent de plus en plus d’importance à leur réputation internationale en se fiant de plus en plus aux critères d’évaluations et aux indicateurs de ces organismes externes d’évaluation, construisant ainsi leurs nouvelles injonctions institutionnelles, et comment enfin tous les acteurs sont désormais reliés autour de ce système de publication qui forme de nos jours le cœur de la concurrence entre les établissements. C’est donc à un processus complexe de construction sociale de la notion de « qualité internationale de l’éducation » auquel nous assistons. En conclusion, nous mettrons en garde contre le risque d'uniformité qu'un tel processus peut entraîner (un seul modèle retenu et reproduit par les établissements d’enseignement à travers le monde), et les principaux effets sur les institutions non anglophones, notamment de langue française.