La présente session s’inscrit dans le cadre des activités du Groupe Thématique Innovation. Elle a pour objectif de permettre des échanges de perspectives autour du développement des trajectoires d’innovations en abordant de façon transversale des problématiques liées au management d’équipes projet et au déploiement de structures ou dispositifs organisationnels adéquats afin de permettre un flux continu d’idées créatives susceptibles de renforcer ou de renouveler les connaissances existantes. Il s’agit également d’explorer les questions relatives à la dépendance de sentier ou à la transformation de ces trajectoires et des territoires qui peuvent leur être associés.
Le Groupe Thématique souhaiterait par la suite valoriser les meilleures contributions via la publication d’un numéro spécial dans une revue académique.
Les projets d’innovation se développent souvent sur la base de recherches préexistantes et peuvent constituer les bases de futurs projets créatifs (Podolny et Stuart, 1995 ; Tushman et al., 1997). Si la littérature existante, définissant les conditions du succès d’innovations, considère essentiellement ces innovations comme isolées les unes des autres (Brown et Eisenhardt, 1995), de nombreux auteurs ont mis en avant la nécessité pour les firmes de lancer des successions d’innovations afin d’assurer leurs revenus sur le court terme et leur pérennité sur le long terme (Eisenhardt et Brown, 1998 ; Le Masson et al., 2006 ; Tushman et al., 2010). La notion de trajectoire d’innovations renvoie ainsi au trajet que décrivent l’ensemble de ces innovations pour atteindre un objectif donné. Certaines recherches mettent en évidence le fait que les trajectoires d’innovations suivies par les entreprises dépendent étroitement de constructions effectuées à partir des connaissances existantes (Boldrini et al., 2007). D’autres mettent en avant la capacité stratégique de l’entreprise qui parvient à générer des idées en rupture avec l’existant afin d’éviter une dépendance de sentier trop forte qui conduirait l’entreprise à ne pas percevoir l’émergence de nouvelles ruptures technologiques ou demandes des consommateurs (Garud et Karnøe, 2001). Ainsi, si les trajectoires d’innovations peuvent permettre à l’entreprise d’obtenir un avantage concurrentiel en renouvelant de façon continue son offre, elles peuvent également engendrer des rigidités organisationnelles, des effets d’inertie et au final conduire les entreprises à persister dans des voies non efficientes (David, 1985 ; Sydow et al., 2009).
Les travaux se sont donc attachés à comprendre comment des entreprises pouvaient réutiliser leur base de connaissances existante afin d’initier de nouvelles trajectoires (Cattani, 2006), les actions stratégiques mises en place par différents acteurs afin de soutenir le développement de trajectoires émergentes (Garud et Karnøe, 2003 ; Sydow et al., 2012) ou au contraire les processus qui conduisent les organisations à verrouiller leurs choix d’innovation et les empêchent de s’extraire de trajectoires technologiques (Schreyögg et al., 2011).
Cependant, différents aspects restent inexplorés :
-Tout d’abord, en termes stratégiques, la capacité des organisations à effectivement transformer, modifier ou renouveler ces trajectoires technologiques a été peu explorée.
-Ensuite, des équipes (groupes projet) sont souvent à l’origine de ces trajectoires d’innovations et poursuivent leur développement. Or la question du développement et de la régénération des trajectoires d’innovations a surtout été posée au niveau organisationnel ou inter-organisationnel et les dispositifs organisationnels ou de management des projets favorables au développement de lignées d’innovations et à leur renouvellement ont été peu abordés.
-Enfin, ces trajectoires sont souvent associées à des territoires et à des réseaux d’entreprises ou d’acteurs institutionnels. La question de l’influence de ces territoires et réseaux sur les effets de dépendance de sentier dans le territoire ou au contraire de dynamisme créatif se pose alors.