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ST-AIMS 06 : Développement durable, RSE et territoire, quelle(s) proximité(s) ?

Les travaux sur le développement durable (DD) et la Responsabilité Sociétale des Entreprises (RSE) semblent encore largement ignorer la dimension spatiale pour privilégier la dimension temporelle (Zuindeau, 1997 ; Laganier et al., 2002 ; Asselineau et Cromarias, 2010). Pourtant, la réussite des stratégies de DD-RSE repose sur l’intégration du territoire comme partie prenante incontournable de l’écosystème des entreprises, indépendamment de leur taille. Les phénomènes organisationnels doivent être appréhendés selon une lecture autour de « tournants » qualifiés de pratique, matériel, processuel et sociétal par De Vaujany et al. (2016), ce qui questionne les relations au territoire.

La notion de territoire très sollicitée notamment dans le champ économique mérite ici d’être précisée. « Le territoire, au-delà de sa définition géographique, se construit autour des acteurs s’y inscrivant, de leurs compétences économiques spécifiques et de la mise en œuvre d’une dynamique productive (Colletis et al., 1999). Il est en ce sens un lieu propice à l’innovation (Rallet et Torre, 2006 ; Buclet, 2011) et à l’entrepreneuriat (Guillouzo, 2014). Cette approche du territoire renvoie à de nombreux concepts clés en management stratégique comme les compétences (Loubès et Bories-Azeau, 2016), les capacités dynamiques, les écosystèmes entrepreneuriaux, la chaîne de valeur  ou encore l’innovation. Un certain nombre d’entre eux ont été mobilisés dans l’étude du tourisme durable (Van der Yeught, 2016 et 2017 ; Berger-Douce, 2015 ; Brasseur et Leroux, 2014). Cette approche implique d’envisager l’entrepreneuriat sous l’angle de sa capacité à réaliser des objectifs de trois ordres sociaux, économiques et environnementaux (i.e. un entrepreneuriat durable, selon Berger-Douce, 2014) de façon contingente au contexte local (Guillouzo, 2014). C’est ainsi par exemple qu’Obrecht et Rahetlah (2014) mobilisent une approche spatialisée de l’entrepreneuriat fondée sur les ressources ou encore que Frimousse (2013) relate un entrepreneuriat responsable encastré dans un territoire qu’elle qualifie d’entrepreneuriat enraciné.    

Par ailleurs, le croisement du développement durable avec le territoire pour en analyser les proximités constitue un appel à des recherches pluridisciplinaires, aux frontières de la géographie, de l’économie, des sciences politiques, du management (management stratégique, gestion des ressources humaines, etc.), voire du génie industriel avec des thématiques comme l’économie circulaire.

Les échelons pertinents d’analyse vont du local au mondial, à en croire les travaux identifiés. Ainsi, Berger-Douce et Courrent (2009) et Van der Yeught et Bon (2016) analysent des expériences menées à l’échelle d’un réseau local de petites organisations. Zuindeau (2012) prône d’étudier le développement durable tant à des échelons territoriaux fins (régional et local) qu’à l’échelle a minima de grandes régions du monde (comme l’Europe) pour garantir des mécanismes efficaces de régulation. Quant à Avom et Gandjon Fankem (2012), leur étude sur le développement durable comme facteur d’attractivité territoriale s’intéresse aux dix pays de l’Afrique Centrale. En résumé, le développement durable étant un phénomène macro-économique, il convient de l’envisager à divers échelons du territoire, du local au global, pour espérer pouvoir tenir les engagements de réduction des émissions de gaz à effet de serre, par exemple. Les défis écologiques et énergétiques du 21ème siècle sont mondiaux, ce qui implique que chaque organisation, à son niveau, soit en capacité de contribuer aux efforts attendus dans les prochaines années (Capron et Quairel-Lanoizelée, 2015). En outre, les parties prenantes (Freeman, 1984) se caractérisent par une diversité croissante, ce qui peut constituer une source de complexité supplémentaire dans l’analyse stratégique et la mise en œuvre des démarches de DD-RSE.

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