Depuis une vingtaine d’année, un ensemble d’innovations managériales concurrentes émergent au sein du paradigme post-bureaucratique. Toutes promettent d’améliorer les capacités d’adaptation et de flexibilité des organisations, principalement par le développement de l’autonomie des collaborateurs et la réduction des niveaux hiérarchiques. Ces tendances conduisent à remettre en question la légitimité et le rôle des managers de proximité à la fois dans les débats professionnels et académiques. D’un côté certains travaux promeuvent l’empowerment des équipes opérationnelles et proposent de supprimer les managers intermédiaires pour favoriser l’agilité des organisations. D’autres soulignent en revanche le rôle stratégique des managers et encouragent les organisations à les désengager d’activités chronophages à faible valeur ajoutée pour qu’ils puissent se dédier à l’accompagnement de leurs équipes. Face à ces prises de positions, nous nous posons la question suivante : quel management de proximité pour les innovations managériales sans managers ?
L’objectif de cet article est d’enrichir notre compréhension des innovations managériales post-bureaucratiques à travers l’analyse de trois catégories d’innovations managériales qui remettent explicitement en question le manager de proximité: la holacracy, les entreprises libérées et la méthode agile Scrum. Pour ce faire, nous nous appuierons sur la grille de lecture proposée par Hatchuel et Weil (1992) en apportant une attention particulière aux visions simplifiées des relations organisationnelles. Nos résultats mettent en lumière les paradoxes entre innovation managériale et management, et soulignent le fait que le management de proximité perdure dans les organisations, même quand la figure du manager disparait. Sans manager, le management de proximité a alors tendance à se répartir parmi plusieurs membres de l’équipe, une situation susceptible de conduire à l’émergence de plusieurs tensions que nous soulignons en conclusion comme pistes de futurs travaux de recherche.