La théorie des parties prenantes - TPP - (Freeman, 1984 ; Donaldson et Preston, 1995 ; Mitchell et al., 1997) a marqué une rupture dans l’analyse du comportement du dirigeant d’entreprise. Ce dernier ne doit pas assumer uniquement sa responsabilité économique à l’égard de ses actionnaires. Il doit également faire face à sa responsabilité sociale à l’égard des nombreuses parties prenantes (salariés, élus politiques, médias, citoyens) de son système politique. Il est pour cela amené à élaborer une stratégie politique (Carroll, 1979 ; Frooman, 1999 ; Harrison et Wicks, 2013).
Des chercheurs ont mis en évidence les limites de la TPP (Agle et al., 2008). Elle a conception orga-centrées du système des parties prenantes du dirigeant et appréhende l’ensemble des interactions comme une somme de relations bilatérales (Rowley, 1997 ; Ferrary, 2009 ; Bergstrom et Diedrich, 2011). Enfin, la TPP manque d’une approche de la dynamique des interactions entre les acteurs du système politique du dirigeant (Avetisyan et Ferrary, 2013).
Cet article vise, en mobilisant l’analyse des réseaux sociaux (Granovetter, 1973 ; 1985 ; 2005 ; Burt, 1997) et la théorie des réseaux complexes (Barasi, Newman et Watts, 2006 ; Jen, 2006 ; Watts, 2004), à construire une théorie des réseaux de parties prenantes. La proposition principale est que le dirigeant est plus ou moins encastré dans un réseau de parties prenantes. Ces réseaux sont soumis à des chocs systémiques de nature aléatoire ou intentionnelle. L’articulation des deux dimensions (degré d’encastrement et nature du choc) permet de construire un modèle explicatif de la stratégie politique mise en œuvre par le dirigeant qu’elle soit réactive, défensive, proactive ou accommodante (Carroll, 1979). Ce modèle est illustré à partir d’exemples de restructurations industrielles menées en France en 2012.
Cette communication vise à contribuer à une meilleure connaissance des stratégies politiques des entreprises en explorant un concept lié et émergent : celui de « diplomatie d’entreprise ». Nous explorons ainsi dans cette communication de concept de « diplomatie d’entreprise » en proposant son articulation avec la stratégie politique des entreprises. La communication est organisée en trois parties. La première partie présente le concept de stratégie politique avant de développer la notion de « diplomatie stratégique La deuxième partie s’intéresse à un champ particulier où se déploient les diplomaties d’entreprise : les institutions européennes à Bruxelles. Nous présentons les règles qui régissent les activités diplomatiques des entreprises auprès des institutions européennes avant d’aborder un cas de « confrontation diplomatique » : le cas de la réglementation de l’étiquetage alimentaire. La troisième partie est consacrée aux enseignements que nous pouvons tirer des stratégies diplomatiques au sein de l’environnement européen ainsi qu’aux pistes de recherche futures.