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Sghairi Neila, Malek Adnane

L’administration publique en Tunisie, à l’instar de ses homologues dans beaucoup de pays, connait une succession de vagues de réformes à travers l’introduction de dispositifs issus de la doctrine du New Public Management (NPM). Ces dispositifs ont une représentation politique, et sont révélateurs de l’art de gouverner. Entant que tel, et d’après la théorie de Michel Foucault sur les catégories de pouvoir, ces dispositifs assurent la gouvernementalité des sujets. Cette supposition a fait l’objet d’une recherche compréhensive (qualitative), à travers une étude de cas dans une administration publique tunisienne. Nous avons menés des entretiens semi-directifs avec des cadres qui ont accompagnés les différentes réformes au sein de cette administration publique tunisienne. Dans notre collecte des données, nous nous sommes aussi, basés sur la documentation interne. L’objectif de cette recherche est de comprendre cette technologie du pouvoir qui réside dans les dispositifs du NPM. Il s’agit d’un pouvoir conçu comme normal par les sujets dominés. Il est véhiculé dans leur conduite et dans leurs propres subjectivités. Il a un ensemble de caractéristiques et remplit un rôle déterminé inscrit dans le temps. Le résultat de cette recherche nous a permis de comprendre que la gouvernementalité s’exerce à travers les dispositifs du NPM qui sont introduits à travers les différentes réformes. Ces dispositifs assurent la disciplinarisation des sujets moyennant la surveillance et la régulation de leur comportement.

Bédoui jerbi Anissa, Malek Adnane

Révolution, insurrection, émeute, « basculement politique », crise politique, « agitations collectives », « effets de contagion », crise, rébellion, mouvements de revendication et de contestation sont autant de phénomènes sociaux complexes observés dans la période de post-révolution. Il ne s’agit nullement d’« un désordre mais plusieurs désordres : inégalité, agitation, turbulence, (…), rupture, (…), instabilité, déséquilibre » (Morin, 2008). Il s’agit d’un contexte de post révolution dans lequel l’organisation publique tunisienne n’a pas été épargnée d’un « effondrement de sens » (Weick, 1993). Ainsi, des mises à la porte des dirigeants, « une dénonciation des velléités hégémoniques » (Nizet & Pichault, 2015) du directoire, une remise en cause du pouvoir, un épuisement des employés, une non reconnaissance de la hiérarchie, une « émancipation » (Alvesson & Willmott, 1992 ; Huault, Perret, & Spicer, 2014) des employés, suivie d’une « rébellion » (Dany, Courpasson, & Riot, 2006), un « pouvoir syndical » (Adam, 1991) s’illustrant par l’interventionnisme du syndicat dans le management courant de l’organisation, ont été constatés. Aussi avec le contexte de post-révolution, les salariés ont acquis une prise à la parole (Chazel, 1967), qui s’est transformée en une anarchie et un refus d’autorité. C’est ainsi que puisant origine d’un interactionnisme, d’un face à face entre les acteurs (employés, directeurs, et syndicats), qu’une perte de sens a eu lieu dans l’organisation publique, terrain de notre recherche durant l’année 2011. « Un jeu des interactions » (Morin, 2008) a amplifié d’une part la complexité du phénomène observé, et d’autre part, a conduit à une « entropie » (Morin, 2008) au niveau de l’organisation publique. Ainsi, cette recherche tente de comprendre le déferlement de sens au niveau de l’organisation publique. En effet, à travers une recherche qualitative recourant à la stratégie de l’étude de cas, nous nous proposons de comprendre, dans un premier temps, la transformation de « l’effondrement de sens » (Weick, 1993) en un état de schizophrénie au niveau de l’organisation, et la modification de la structure organisationnelle, dans un second temps. Aussi, nous nous interrogeons par rapport à la déviance organisationnelle comme étant d’un côté la matérialisation de la perte de sens et de l’autre côté, la résultante de l’inégalité en matière de justice organisationnelle. Pour observer ce phénomène organisationnel complexe, nous avons sollicité à la fois la théorie du sensemaking (Weick, 1979 ; 1995) et la théorie de l’émancipation et la résistance (Alvesson et Willmott, 1992). Nous avons recouru à une triangulation au niveau des outils de collecte des données (participation observante, recueil documentaire, recours à Facebook et entretien informel). Cette recherche nous a permis de conclure que l’effondrement de sens donne lieu à un “changement émergent” (Weick, 2009). Aussi, les actions de revendication et de révolte, incarnant l’expression d’un affect négatif, ont donné naissance à une déviance organisationnelle traduisant l’injustice organisationnelle perçue.

Moncef Hanen, Malek Adnane

Il y a plus de quatre ans, un jeune tunisien s’est immolé. Il a mis fin à sa vie. En ce moment-là les tunisiens ont commencé à se poser la question suivante : Qu’est-ce qui se passe ici ? Pour le monde des organisations, les gens se croient tout permis au nom de la liberté ; les salariés font fi des règles et n’obéissent plus à leurs supérieurs. C’est dans ce contexte caractérisé par l’incertitude et l’équivocité, que notre projet de recherche tend à s’identifier. Est-ce que les individus partagent le même sens de ce qui se passe ? Est-il encore possible de coordonner les différents comportements pour agir ensemble ? Comment les individus s’engagent dans une action collective ? C’est en s’inspirant de ces interrogations que ce travail est parti. Pour répondre à ces questions, nous avons recouru à la théorie du sensemaking et la théorie de la régulation sociale et nous nous sommes inscrits par rapport au paradigme interprétativiste. Nous avons poursuivi comme stratégie de recherche la méthode de l’étude de cas, et nous avons recouru au niveau de la collecte des données aux entretiens collectifs. Les résultats de notre recherche permettent de concevoir l’action collective dans une logique interactionniste qui évolue perpétuellement tout en suivant la dynamique du processus de création de sens et la mouvance de la vie des règles.