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Guérineau Mathias, Ben mahmoud-jouini Sihem, Charue-duboc Florence

Les innovations fondées sur des connaissances tacites et complexes se déploient difficilement au sein d’une multinationale (FMN), surtout si elles émergent et sont développées localement au niveau d’une filiale. La littérature sur les communautés de pratiques a mis en évidence leur rôle de ces dernières dans la constitution et le partage de connaissances ancrées dans des pratiques. Cependant, une question persiste : ont-elles un impact positif ou négatif dans la combinaison des connaissances inter communautés ? Or les processus d’innovation supposent la combinaison de connaissances. Nous souhaitons ainsi dans cet article contribuer à ce débat en éclairant le rôle des communautés de pratiques et leur combinaison dans les processus d’innovation des FMNs. A partir d’une analyse détaillée du développement et du déploiement d’une innovation dans une multinationale qui met en scène différentes communautés de pratiques, nous discutons le rôle des communautés de pratiques et de la combinaison de leurs implications dans la construction et le partage des connaissances nécessaires au développement et au déploiement d’une innovation. Nous enrichissons ainsi la littérature en management international et en management des connaissances.

Gastaldi Lise, Charue-duboc Florence

Une des questions cruciales qui se posent en matière de management de l’innovation technologique est celle du couplage entre deux dynamiques d’apprentissage : l’exploration de la valeur associée à une innovation d’un côté, et le développement des savoirs scientifiques et techniques nécessaires à la conception de nouveaux objets, services ou systèmes technologiques de l’autre. De nombreuses recherches se sont attachées à cette question. Certains ont caractérisé des principes de couplage, différents selon les auteurs et les périodes (science push, market pull, exploration concourance). D’autres se sont attachées à mettre en avant, au-delà des principes, des modalités concrètes de couplage, également variées. Les réponses qu’apporte la littérature sont nombreuses, mais elles sont souvent partielles du fait de la focalisation fréquente des travaux sur un type de modalités de couplage, et parfois contradictoires quant à la manière d’organiser un tel couplage. Il ne s’agit donc pas d’une question qui aurait été « réglée » du fait que des travaux s’y intéressent depuis longtemps, et il faut de plus considérer comment elle se pose en des termes plus vifs que jamais compte-tenu de l’environnement qu’affrontent aujourd’hui les entreprises. Ainsi, dans le contexte actuel de compétition par l’innovation, repère-t-on dans les pratiques empiriques des entreprises technologiques des évolutions par rapport aux modalités de couplage déjà mises en lumière dans la littérature, ou alors des combinaisons entre plusieurs modalités, souvent analysées isolément, ou encore le déploiement de nouvelles approches ? Comment ces mécanismes de couplage s’appuient-ils sur des dynamiques individuelles et collectives de compétences ? Tel est le projet poursuivi dans ce travail qui étudie pour ce faire le cas d’une grande entreprise du secteur des technologies de la communication et de l’information, lequel est marqué par une très forte intensité concurrentielle. Cette entreprise qui était initialement positionnée sur les télécoms est également entrée de plein fouet dans l’ère du digital. En réponse à ce contexte, elle a engagé une refonte de l’organisation et des principes de pilotage de sa R&D dans l’objectif d’accélérer le processus d’innovation et de mieux répondre aux besoins des clients. Un nouveau type d’activités – dit de « ciblage prospectif » - a ainsi été créé, lequel vient s’insérer au milieu des activités plus traditionnelles de recherche et de développement, afin de favoriser le passage des innovations développées par la R&D vers les unités d’affaires et le marché et, réciproquement, de mieux orienter les projets de R&D en fonction des domaines clés identifiés par les unités d’affaires. L’analyse empirique a permis de caractériser cette activité qui opère une incarnation des concepts définis par la recherche dans des prototypes logiciels notamment, lesquels permettent de « tester » ces concepts auprès de clients et d’en évaluer la pertinence, et le cas échéant d’intéresser des alliés pour pousser plus loin les travaux. Les résultats montrent le caractère original et combinatoire de cette modalité de couplage, mais également son caractère inachevé, et les problématiques d’apprentissage individuel et collectif qui persistent.