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Bédoui jerbi Anissa, Malek Adnane

Révolution, insurrection, émeute, « basculement politique », crise politique, « agitations collectives », « effets de contagion », crise, rébellion, mouvements de revendication et de contestation sont autant de phénomènes sociaux complexes observés dans la période de post-révolution. Il ne s’agit nullement d’« un désordre mais plusieurs désordres : inégalité, agitation, turbulence, (…), rupture, (…), instabilité, déséquilibre » (Morin, 2008). Il s’agit d’un contexte de post révolution dans lequel l’organisation publique tunisienne n’a pas été épargnée d’un « effondrement de sens » (Weick, 1993). Ainsi, des mises à la porte des dirigeants, « une dénonciation des velléités hégémoniques » (Nizet & Pichault, 2015) du directoire, une remise en cause du pouvoir, un épuisement des employés, une non reconnaissance de la hiérarchie, une « émancipation » (Alvesson & Willmott, 1992 ; Huault, Perret, & Spicer, 2014) des employés, suivie d’une « rébellion » (Dany, Courpasson, & Riot, 2006), un « pouvoir syndical » (Adam, 1991) s’illustrant par l’interventionnisme du syndicat dans le management courant de l’organisation, ont été constatés. Aussi avec le contexte de post-révolution, les salariés ont acquis une prise à la parole (Chazel, 1967), qui s’est transformée en une anarchie et un refus d’autorité. C’est ainsi que puisant origine d’un interactionnisme, d’un face à face entre les acteurs (employés, directeurs, et syndicats), qu’une perte de sens a eu lieu dans l’organisation publique, terrain de notre recherche durant l’année 2011. « Un jeu des interactions » (Morin, 2008) a amplifié d’une part la complexité du phénomène observé, et d’autre part, a conduit à une « entropie » (Morin, 2008) au niveau de l’organisation publique. Ainsi, cette recherche tente de comprendre le déferlement de sens au niveau de l’organisation publique. En effet, à travers une recherche qualitative recourant à la stratégie de l’étude de cas, nous nous proposons de comprendre, dans un premier temps, la transformation de « l’effondrement de sens » (Weick, 1993) en un état de schizophrénie au niveau de l’organisation, et la modification de la structure organisationnelle, dans un second temps. Aussi, nous nous interrogeons par rapport à la déviance organisationnelle comme étant d’un côté la matérialisation de la perte de sens et de l’autre côté, la résultante de l’inégalité en matière de justice organisationnelle. Pour observer ce phénomène organisationnel complexe, nous avons sollicité à la fois la théorie du sensemaking (Weick, 1979 ; 1995) et la théorie de l’émancipation et la résistance (Alvesson et Willmott, 1992). Nous avons recouru à une triangulation au niveau des outils de collecte des données (participation observante, recueil documentaire, recours à Facebook et entretien informel). Cette recherche nous a permis de conclure que l’effondrement de sens donne lieu à un “changement émergent” (Weick, 2009). Aussi, les actions de revendication et de révolte, incarnant l’expression d’un affect négatif, ont donné naissance à une déviance organisationnelle traduisant l’injustice organisationnelle perçue.