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Guillouzo Raymond, Thepaut Yves

Auteur

Raymond GUILLOUZO

Yves THEPAUT

 

Résumé

Si le thème des accords de coopération a suscité de nombreux travaux issus de divers champs disciplinaires, force est de constater qu’il n’existe pas à l’heure actuelle de théorie standard de la coopération inter-firmes [Dulbecco, 1991]. Trois grands courants théoriques dominants (théorie des coûts de transaction, théorie des ressources, et théorie des marchés) sont habituellement mobilisés pour justifier la conclusion d’accords mais chaque corpus pris isolément ne justifie en fait qu’une catégorie précise d’accords. Si l’information est présente dans ces diverses approches, elle n’est pas envisagée comme domaine pertinent et autonome d’analyse et son rôle dans la coopération, notamment au travers du pouvoir lié à sa détention, n’est pas explicitement observé.

L’objectif de cette contribution est de proposer une approche complémentaire aux explications habituelles des accords de coopération en s’appuyant sur le concept de « pouvoir informationnel ». Nous avançons la thèse que le pouvoir informationnel permet d’obtenir un avantage économique net c’est-à-dire une rente informationnelle et, est à même d’expliquer certains comportements observables comme les alliances.

Notre démarche repose sur deux hypothèses principales :

- d’une part, la recherche du pouvoir, envisagé comme une relation dissymétrique [Perroux, 1961], représente un facteur explicatif du comportement stratégique des acteurs;

- d’autre part, le pouvoir informationnel réside notamment dans l’inégalité de possession de l’information et peut être mis en évidence dans bon nombre d’accords.

Les accords de coopération sont retenus comme domaine d’observation de l’exercice du pouvoir informationnel pour trois séries de raisons :

- ils sont conclus dans un contexte d’asymétrie de l’information ;

- ils mettent souvent en jeu de l’information ;

- ils sont susceptibles d’impliquer des relations de pouvoir entre alliés.

Sur la base d’une analyse d’un échantillon d’accords noués dans divers secteurs et distingués selon la catégorisation de Koenig [1996], nous identifions quatre stratégies principales, relatives à l’information, mises en oeuvre au sein de la coopération inter-firmes. Elles concernent la production, la captation, la rétention et la diffusion de l’information et s’inscrivent dans le cadre de la recherche d’un pouvoir lié à l’information.

Nous avons constaté que le pouvoir informationnel s’exerce dans tous les types d’accords répertoriés et approfondit la compréhension des pratiques de la coopération en introduisant dans l’analyse le rôle du pouvoir. Il peut en conséquence se positionner comme élément explicatif complémentaire aux approches théoriques généralement avancées.

L’information est en effet appréhendée comme source de pouvoir en raison de son asymétrie (théorie des contrats), comme ressource productive (théorie des ressources) et comme source d’avantage concurrentiel (théorie des marchés) et le pouvoir informationnel apparaît, quant à lui, doté d’une capacité de rapprochement de ces courants.