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Kokou dokou Gérard, Mazouz Bachir

Auteur

Bachir MAZOUZ

Gérard Kokou DOKOU

 

Résumé

OEuvrant dans le cadre d’un programme de recherche pluridisciplinaire sur l’évolution des firmes en longue période (CNRS URA 936), la présente réflexion se propose de livrer à la critique académique des résultats d’explorations empiriques portant sur la nature des relations entre la diversité des styles cognitifs des dirigeants et celle des trajectoires évolutives de leurs entreprises.

L’hypothèse fondamentale qui sous-tend nos travaux peut être formulée de la façon suivante : la diversité des trajectoires d’évolution des firmes trouverait une explication pertinente dans la diversité des mécanismes cognitifs impliqués dans les comportements décisionnels de leurs dirigeants.

Conscients des difficultés méthodologiques et conceptuelles que pose le passage de la cognition individuelle à la cognition organisationnelle (KIM, 1992; SPENDER, 1994; WALSH 1994; LAURIOL, 1995; VOGLER, 1996; MAZOUZ, 1998), cette étude postule la centralité des dirigeants d’entreprises et de leurs styles cognitifs de décision dans toutes démarches d’investigations /conceptualisation en matière de recherche sur les facteurs, rythmes et processus d’évolution des firmes.

Empruntant une piste que nous qualifions de neuro-décisionnelle, par référence aux paradigmes neuroscientifiques et aux théories de la décision que nous mobilisons, nous nous sommes intéressés principalement aux dimensions conjecturales (feeling, vision, insight) versus rationnelles (TAGGART et VALENZI 1990, notamment) impliquées dans la perception, l’interprétation, le traitement et l’incorporation de changements (KIESLER et SPROULL, 1982).

Pour les besoins de ce papier, nous nous contentons de livrer à la critique des résultats extraits d’une étude longitudinale regroupant 34 firmes. Cette étude est focalisée sur la nature des relations qui pourraient exister entre des styles cognitifs de décision, des contextes d’action et des types d’événement impliqués lors d’un processus décisionnel.

Sur le plan méthodologique, notre démarche consiste à analyser empiriquement, moyennant un questionnaire centré administrable sur site, des trajectoires d’évolution de 34 firmes de petite et moyenne dimensions, ayant entre 10 et 25 années d’exercice, opérant dans des secteurs d’activité divers et siégeant dans le Nord de la France. Précisons que l’étude en question dure depuis 1993 et les premiers résultats datent de 1997.

L’examen des trajectoires d’évolution des firmes révèle que 26 points d’inflection (bifurcations) sont marqués par un recours intensif aux SCD afin de pallier les insuffisances informationnelles, procédurales et/ou situationnelles.

Ces résultats nous autorisent à avancer trois suggestions nous permettant de souligner la part des styles conjecturaux de décision (SCD) dans la compréhension des phénomènes liés à la dynamique globale des firmes : (1) Il existe bel et bien des conditions environnementales particulières qui favorisent le recours intensif aux SCD, (2) il existe des domaines d’activité managériale où les SCD sont particulièrement efficaces et, enfin (3) il existe des profils socioprofessionnels de décideurs conjecturaux.

En guise de conclusion, nos apports académiques et professionnels plaident respectivement pour (1) le développement de programmes de recherche et d’enseignement non analytiques (créativité, intuition, aptitude au qualitatif et à l’holistique, imagerie mentale…) et (2) pour la reconnaissance explicite du rôle que jouent les capacités conjecturales dans la conduite des affaires et la pratique du management aux plus haut niveaux des firmes.