AIMS

Index des auteurs > Pellissier-tanon Arnaud

Pellissier-tanon Arnaud

Auteur

Arnaud PELLISSIER-TANON

 

Résumé

En deça du débat épistémologique opposant le constructivisme au positivisme, un consensus commence à se dégager en faveur du "pluralisme méthodologique" qu'Alain-Charles Martinet (1990) appelait de ses voeux il y a déjà dix ans. Le dernier congrès de l'AIMS en a témoigné : Ababacar Mbengue et Isabelle Vandangeon-Derumez (1999) y ont relevé qu' "il existe de nombreuses façons de faire de la recherche si l'on se réfère à la diversité des statuts des données, des modes de collectes des données, de la relation entre la théorie et les observations empiriques et des critères de scientificité de la recherche" (p. 19).

Et s'ils ont conclu leur communication en disant que la position épistémologique du chercheur, "ne doit pas lui dicter le choix de la nature de l'outil, qualitative ou quantitative, mais la façon dont il va le mettre en oeuvre" (p. 19), il ressort toutefois de leur examen des relations qu'entretiennent la théorie et les observations empiriques un constat quelque peu pessimiste : ils ne le disent pas explicitement mais on ressent comme une opposition entre la généralité des conjectures formulées à l'aide d'une démarche hypothético-déductive et la certitude des expériences d'un contexte précis, fondées sur une démarche inductive.

Cette communication analyse cette opposition. Elle cherche à montrer, précisément, que le dilemme qui opposerait, au sein des savoirs en gestion, la généralité des conjectures à la certitude des expériences n'est pas si irréductible qu'on pourrait le croire et qu'il trouve in fine sa solution dans la qualité du raisonnement inductif mené par le chercheur.

Elle s'appuie sur la suggestion qu'Albert David (1999) a formulée au dernier congrès de l'AIMS, à savoir que, l'opposition des démarches inductives aux démarches hypothético-déductives découle de la fausse association, héritée de l'histoire de notre discipline, de ces premières aux épistémologies constructivistes et de ces secondes aux épistémologies positivistes, et, que pour fédérer les différentes approches méthodologiques, "il faut dépasser l'opposition classique entre démarche inductive et démarche hypothético-déductive et considérer une boucle récursive abduction, déduction, induction" (p. 1). Une critique interne des raisonnements tenus dans cette boucle nous conduira à conclure qu'elle ne comporte pas, à proprement parler, d'induction et nous permettra, de relever que toutes les recherches, qu'il s’agisse de découvrir la cause d’un fait particulier ou de retracer les effets possibles de ce fait, reposent, ab ovo, sur une induction.

L’induction prend donc un relief particulier -c’est elle qui permet d'énoncer des théories nouvelles- ainsi que la qualité du raisonnement inductif -c’est lui qui assure l'universalité des théories qu’elle énonce-. Nous analyserons donc avec attention le travail que le chercheur mène lorsqu'il procède à une induction : induire une loi consiste à saisir la nécessité qui sous-tend les faits contingents appréhendés, ce qui exige du chercheur qu'il applique son intelligence à en isoler les ressemblances des dissemblances. L'induction n'a rien de facile et l'isolation des ressemblances d'avec les dissemblances n'a rien d'évident, si bien que le chercheur doit pouvoir rendre compte de son induction et donc du choix de ses isolations. Il est conduit, pour cela, à faire un usage précis du langage naturel (par opposition au langage symbolique) car seul ce langage permet d'exprimer la nécessité qui sous-tend les faits contingents. En bref, le dilemme des savoirs en gestion trouve in fine sa solution dans la qualité du raisonnement inductif mené par le chercheur.