AIMS

Bouglet Johan
La gestion des attentes comme contribution à la théorie des parties prenantes

Auteur

Johan BOUGLET

Résumé

La théorie des parties prenantes vise à établir les priorités du dirigeant, en recensant celles qui « comptent réellement », selon les termes de Freeman (1984). Dans cette optique, les modèles d’identification des parties prenantes jouent un rôle essentiel. Néanmoins, un certain nombre de critiques souligne les limites de ces modèles : à leur insuffisante prise en compte des relations entre parties prenantes s’ajoute leur difficulté à se placer dans un cadre dynamique. En réaction, l'objet est dans cet article de fournir un cadre théorique capable de mieux identifier les priorités du dirigeant, en y intégrant les relations entre parties prenantes et la dimension dynamique.

Nous partons pour cela des modèles traditionnels, notamment de celui de Mitchell, Agle et Wood (1997), dont les limites tiennent selon nous à l’unité d’analyse choisie : la partie prenante. La focalisation sur cette dernière est à l’origine d’un certain nombre d’ambiguïtés et limite l’analyse des rapprochements entre parties prenantes. Cela rend difficile l’identification, par le dirigeant, de phénomènes pourtant menaçants : les coalitions que peuvent former les parties prenantes.

Afin de lever ces ambiguïtés, nous proposons de changer l’unité d’analyse, en se focalisant non plus sur les parties prenantes, mais sur leurs attentes. D’une typologie des parties prenantes, nous passons alors à une typologie des attentes. L’exemple du groupe Air France, confronté à une série de grèves entre 1989 et 1993, illustre la façon dont une analyse fondée sur cette typologie offre une vision plus claire des priorités, et montre comment, dans une optique instrumentale, le dirigeant peut l’utiliser pour y faire face.

Nous dotons ensuite l’approche par les attentes d’une dimension dynamique, en considérant qu'une même attente est susceptible de changer dans le temps ou que la venue de nouvelles parties prenantes au sein d’une coalition peut faire évoluer une attente d'un type vers un autre. Dans ce cadre, notre typologie permet l'anticipation et l'analyse de nouvelles situations, ce qui offre la possibilité au dirigeant de mieux s'y préparer et d'éviter la formation des coalitions les plus probables. Ici encore, nous mobilisons l’exemple du groupe Air France pour montrer comment, dans une optique instrumentale, le dirigeant peut mener une gestion dynamique de ses priorités.