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Richomme-huet Katia

Auteur

Katia RICHOMME

 

Résumé

Notre problématique se situe dans un champ d’étude peu étudié jusque lors en gestion, à savoir le secteur des métiers français ou artisanat. La plupart des créations ou reprises d’entreprises artisanales sont issues de la volonté d’un couple marital, ce qui en fait une particularité de ce secteur. De plus, même si l’entrepreneuriat féminin est repéré statistiquement, le nombre de conjoints collaborant à l’activité de l’entreprise n’est répertorié qu’à la condition que ce statut soit déclaré auprès des Chambres de Métiers. Sinon, le conjoint rejoint l’obscure catégorie statistique du répertoire des métiers, c'est-à-dire les employés non salariés.

En conséquence, nous nous sommes concentrés sur le sujet ou l’unité d’analyse, c'est-à-dire le conjoint proprement dit, copilote de l’entreprise artisanale. La situation des femmes co-entrepreneurs par rapport à leur conjoint chef d’entreprise a été rarement évoquée. A notre connaissance, les différents courants de recherche sur les PME, l’entrepreneuriat ou l’entreprise familiale occultent la prise de risque du conjoint. Ainsi, pour les deux tiers des entreprises artisanales individuelles, le risque majeur est celui de la faillite entraînant une liquidation de l’entreprise. Mais d’autres types de risque existent, impliquant pour la plupart le conjoint : les risque liés au régime matrimonial, aux cautions, au statut dans l’entreprise, à la forme juridique de l’entreprise et les risques en cas de maladie, d’invalidité, de décès du chef d’entreprise ou de divorce.

De plus, en l’absence de dispositions particulières, le conjoint est considéré comme « sans profession », et son travail, assimilé à une simple entraide familiale, ne lui donne que peu de droits sur l’entreprise et aucune protection sociale personnelle, malgré la création de statuts juridiques spéciaux.

Nous nous sommes alors intéressés au rôle du conjoint en repérant comment sont introduites les fonctions administratives et comptables dans l’entreprise, comment s’équilibrent les tâches secondaires et tertiaires, et quelles différenciations on peut constater selon les types d’entreprises, leur position sur le marché et leurs perspectives d’avenir. A partir de la littérature, nous avons proposé un outil d’analyse, basé sur quatre scénarios, permettant à la fois de situer l’entreprise dans sa situation actuelle et d’envisager les solutions à apporter pour améliorer son organisation. Après avoir soumis ces scénarios à des interlocuteurs privilégiés des conjoints au sein de la chambre des métiers de Meurthe-et-Moselle, nous présentons leurs conclusions, beaucoup plus pessimistes que les enquêtes précédentes ne le laissaient croire.

En dernier lieu, il ressort plus particulièrement de l’analyse de la situation réelle du conjoint qu’il est un acteur essentiel de l’entreprise et qu’il nécessite une réelle stratégie de développement fondée sur la reconnaissance de ses compétences et de ses aptitudes à cogérer l’entreprise. Cette stratégie est actuellement développée grâce à des formations diplômantes, dont l’objectif est d’aider le conjoint à jouer ce rôle de copilote et de permettre aux structures artisanales d’utiliser au mieux les capacités des conjoints. Cependant, ces formations qualifiantes, qui tendent au départ à viser le couple responsable de l’entreprise, sont sous-utilisées par les conjoints et complètement délaissées par les chefs d’entreprise. Les raisons de ce manque d’intérêt sont essentiellement d’ordre sociologique (engagement familial, refus d’une autonomie de la femme) et plus rarement d’ordre économique (contraintes de temps et/ou de lieu). Ainsi, l’analyse de la réalité artisanale met en avant les facteurs de blocage que peut représenter l’union matrimoniale sur la gestion d’une entreprise.