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Nlemvo ndonzuau Frédéric thaddée

Auteur

Frédéric Thaddée NLEMVO NDONZUAU

 

Résumé

A l'heure de la mondialisation, la diversification géographique ou internationalisation des activités de la firme est-elle encore un choix stratégique ou un impératif de survie et une règle de bonne gestion? La démarche choisie pour répondre à cette question relève plus de la démonstration par l'absurde.

La diversification géographique joue un rôle essentiel dans le comportement stratégique des grandes firmes. L'étude de sa relation avec la performance de l'entreprise a été abondamment traitée dans la littérature mais avec des résultats mitigés. Certaines études ont conclu à une relation positive et d'autres n'ont trouvé aucune relation linéaire.

Diverses pistes ont été avancées pour expliquer ces résultats contradictoires. Une littérature peu abondante considère que la théorie de l'agence permet également d'expliquer le choix d'internationalisation.

En effet, en contrepartie des opportunités qu'elles offrent, les opérations à l'étranger peuvent être source de défis concurrentiels, aussi bien de la part des concurrents étrangers que locaux, diversement appréciés selon que l'on est manager ou actionnaire. Il en résulte que la diversification géographique des activités de l’entreprise est une décision stratégique sur laquelle les intérêts des actionnaires et des managers pourraient diverger.

Une telle diversification peut, en effet, exacerber les problèmes d’agence entre actionnaires et managers dans la mesure où les opérations lointaines sont plus difficiles à contrôler par les actionnaires, notamment parce qu’elles mettent l’entreprise en contact avec d’autres cultures, de nouveaux concurrents et d’un environnement caractérisé par des facteurs économiques et légaux différents.

Dans cet article, nous nous servons de la théorie de l'agence comme source d'explication, à côté de celle des coûts de transaction et de la "ressource based view", pour explorer la relation entre la concentration de l'actionnariat et le choix de diversification géographique.

A cet effet, partant d'un échantillon de 755 entreprises issues de six pays (Belgique, Corée du Sud, Japon, Singapour, Suède et Etats-Unis) nous tentons de répondre aux trois questions suivantes: (i) La structure de l’actionnariat affecte-t-elle le choix d'internationalisation de l’entreprise? (ii) Cette relation est-elle linéaire? (iii) Le contexte national modère-t-il cette relation?

En tentant de répondre à ces questions, l'objectif du présent article est également d'examiner si la pertinence des arguments développés par la théorie de l'agence, quant à la relation examinée, est encore d'actualité.

En gros, dans le présent article, nous montrons que la concentration de l’actionnariat n'est que rarement liée à la décision d'internationalisation de la firme et que cette relation n'est pas toujours linéaire et varie - en intensité et/ou en sens - d’un pays à l’autre. Ainsi donc, les résultats présentés n’accréditent que très peu la prédiction (d'une relation négative) de la théorie de l’agence. Dans la plupart des cas, la relation entre les deux variables considérées est inexistante.

Ce résultat pourrait être le reflet de la mondialisation, laquelle contraint les entreprises à considérer l’internationalisation des activités comme une nécessité vitale, comme un acte de bonne gestion plutôt qu’un choix stratégique.

Malgré les limites de ce travail, parmi les implications de nos résultats, nous pouvons mentionner: (i) la nécessité de tenir davantage compte de la nonlinéarité dans les relations étudiées en sciences de gestion; (ii) le rejet ou en tout cas la remise en cause de l’hypothèse de l’universalité des théories économiques; et (iii) la nécessité d’examiner davantage la généralisabilité des résultats de recherche sur le corporate governance, le contexte national étant une variable contingente qui, souvent, joue un rôle modérateur et permet dès lors d’affiner notre connaissance des relations économiques.

Ces limites ainsi que les implications des résultats de cette étude ouvrent la voie à des pistes de recherche, notamment: (i) le recours à d’autres spécifications et à d’autres méthodologies, par exemple des études « cliniques » intégrant l’identité de l’actionnaire ou et/ou incorporant des variables contextuelles nondichotomiques et d’autres variables de contrôle; et (ii) la réplication de la présente étude, éventuellement en adoptant les améliorations méthodologiques suggérées ci-dessus ou en explorant d’autres contextes (échantillons). De telles études permettraient de clarifier les relations mises en valeur par le présent article et d’en étendre la généralisabilité.