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Deltour François

Auteur

François DELTOUR

 

Résumé

Les interrogations portant sur les pratiques de réseau interne concernent principalement les organisations marchandes. A partir d’un projet mené dans une administration publique française, nous souhaitons étudier et élargir plusieurs aspects essentiels de la dynamique des réseaux internes. Le terrain d’étude retenu est un réseau interne professionnel qui relie les différents services déconcentrés chargés dans chaque département des questions d’hygiène publique et de santé environnementale (assainissement de l’eau, gestion des déchets, sécurité sanitaire des établissements publics…). Matériellement, les échanges d’information se font par le biais d’une messagerie et de pages intranet gérées collectivement. Ce réseau repose sur l’échange d’expériences, la mise en commun de savoirs, les sollicitations ponctuelles, la constitution progressive d’un référentiel méthodologique collectif. Cette démarche, caractérisée par l’interactivité des interventions et la libre implication de ses membres, est de type horizontale. Elle se superpose à une structure bureaucratique verticale.

Cette étude de cas suit une approche de type multiniveaux, jugée comme la plus pertinente pour l’analyse du changement initié par le réseau.

Une première interrogation porte sur la nature de la démarche. S’agit-il d’un réseau au sens où l’entendent les auteurs en gestion ? Dans les entreprises, le développement de réseaux internes repose sur la recherche d’efficience par l’introduction d’une logique de type marché à l’intérieur de l’organisation. Dans le cas étudié, il y a bien une recherche d’efficience, notamment dans une logique de service public et de réponse à la pression accrue quant à la responsabilité de l’administration en terme de santé publique. Mais ici, la recherche d’efficience ne passe pas par la logique concurrentielle. Malgré ce contexte différent, il apparaît que le réseau professionnel d’échange d’information constitue bien un mode de fonctionnement non-hiérarchique et coordonné. Il s’agit donc bien mode de fonctionnement de type réseau.

La deuxième partie porte sur le fonctionnement du réseau. L’accroissement de l’efficience des services repose sur un mode nouveau de gestion des compétences collectives. La mobilisation d’une analyse en terme d’apprentissage organisationnel confirme la nature et la portée des apprentissages recherchés : c’est parce qu’il y a diversité locale des savoirs que les services ont intérêt à échanger entre eux. L’apprentissage qui en résulte est de type simple boucle.

Cependant, la mise en place d’une organisation apprenante dépend avant tout des comportements individuels d’échange. Une analyse de la motivation individuelle à échanger est proposée. Il ressort, notamment du fait d’une absence de concurrence entre services, que la participation des membres se fait dans la recherche d’un bénéfice mutuel et non pas d’un intérêt individuel.

Dans un dernier point, les possibles effets structurant du réseau sont évalués de manière conjecturale, en s’appuyant sur les travaux portant sur les relations entre technologies de l’information et organisation. Deux voies divergentes d’évolution se dessinent : le développement du réseau peut être perçu alternativement comme un facteur d’autonomie pour les services ou comme un facteur de recentralisation de l’organisation. Le réseau apparaît alors comme un soutien à la structure bureaucratique. Il permet ainsi d’en effacer certaines limites.