Auteur
Fortoul Anna
Résumé
Cette recherche trouve son fondement dans un questionnement issu du terrain. Une dizaine de responsables d’un constructeur automobile français a souhaité connaître les enseignements possibles d’une analyse a posteriori de la prospective concernant un projet d’innovation dans le produit automobile. Son objectif était d’identifier les causes d’un éventuel écart entre l’appréhension du futur et ce qui est réellement advenu.
Une approche analytique de ce questionnement a conduit à remettre en cause la pertinence et la validité des résultats potentiels d’une telle étude. De ce fait, nous avons recentré la problématique, portant alors sur l’intégration des informations constitutives d’une vision prospective dans le processus de délibération et dans la décision d’engagement du projet d’innovation. L’étude de la dimension prospective au sein des phases amont d’un projet a été jusque-là peu considérée dans les écrits académiques, justifiant de ce fait notre approche.
La conceptualisation d’un cadre théorique synthétique, fondé sur la littérature dans les domaines de l’innovation, du projet et du rôle de l’information en entreprise, est conjuguée à une analyse approfondie d’un cas pilote, le projet de la berline monocorps chez Talbot-Peugeot entre 1978 et 1982 (concept connu aujourd’hui sous le nom de monospace). L’objectif de cette démarche est d’affiner les axes de recherche pour l’étude d’autres cas de processus de délibération.
Les résultats de ce travail se présentent sous forme d’observations qui mettent en relief les liens entre plusieurs dimensions du processus de délibération, à savoir entre le type d’informations qui constituent les visions prospectives des acteurs, le moment de l’intégration, le type d’intégrateur et la finalité de l’utilisation.
Auteur
Roy Pierre
Résumé
La communication explore une problématique émergente dans la littérature en stratégie, celle du changement des règles du jeu concurrentiel, appréhendée ici du point de vue des firmes dominantes. L’objectif poursuivi réside dans l’analyse des défis et des enjeux concrets que rencontrent les firmes aux différentes étapes d’une stratégie de perturbation. L’étude détaillée de la diffusion des multiplexes dans le secteur français des salles de cinéma illustre notre propos. Le traitement des données, articulé autour d’une triangulation des méthodes, dévoile les déterminants, les facteurs clés de succès et les implications de la perturbation introduite par la firme Pathé.
Auteurs
Chanal Valérie
Caron-Fasan Marie-Laurence
Résumé
Les projets d’innovation technologique doivent s’accompagner d’une réflexion stratégique en amont sur le modèle de création de valeur à partir de la technologie. Le plus souvent en effet, les innovations technologiques réussies s’accompagnent d’une innovation dans les business models. L’exploration de nouveaux business models est cependant particulièrement difficile lorsqu’il s’agit d’une technologie de rupture par manque de vision sur les marchés et les applications visés. Cet article propose une méthode d’exploration de nouveaux business models pour les innovations technologiques, basée sur une démarche de scénarios. La méthode prévoit un questionnement général sur les business models enrichi de questions spécifiques à la technologie développée, puis l’élaboration de scénarios de business models basés sur les scénarios d’usage dans différents domaines d’application de la technologie. L’élaboration des scénarios consiste à créer des business models contrastés mais cohérents en faisant varier les différents éléments des business models retenus (types de client, proposition de valeur, logique économique, organisation du réseau de valeur, critères technologiques et marketing propres à la technologie). Cette méthode a été conçue pour accompagner une innovation technologique radicale dans le domaine des télécommunications, dans le cadre d’un projet européen. L’article présente la technologie en cours de développement et la manière dont les auteurs ont conçu la grille de questionnement sur les business models et ont élaboré différents scénarios à partir des usages de la technologie. Cette démarche ouvre des perspectives tant théoriques que managériales : elle permet d’opérationnaliser la notion de business model en la reliant à l’innovation technologique d’une part et aux usages d’autre part. Cette méthode devrait être prolongée par la mise en récit des scénarios ainsi élaborés afin de les tester auprès des parties prenantes du projet.
Auteurs
José Vitor Bomtempo
Luiz Paulo Bignetti
Flávia Alves
Paulo Coutinho
Résumé
Cet article explore la notion de compétences pour innover pour analyser la capacité innovatrice de l'industrie pétrochimique brésilienne. Cette capacité est mise en relation avec les défis stratégiques auxquels l'industrie chimique doit faire face dans les années qui viennent. Initialement sont présentées les difficultés historiques de l'innovation au Brésil, les approches habituelles des études en innovation et les solutions postulées par les divers acteurs concernés. Partant d'un cadre analytique adapté de François et al (1999), on étudie le niveau de développement des compétences pour innover des firmes pétrochimiques (produits de base, résines et polymères) dans les trois complexes brésiliens. Ces compétences sont classées, selon leur nature, dans quatre types : techniques, de moyen, relationnels et organisationnels. Les résultats de l’analyse quantitative suggèrent que les compétences techniques sont les plus développées alors que les compétences organisationnelles présentent le niveau le plus bas. Il est possible d’observer qu'il a y eu une forte préoccupation avec les aspects techniques au détriment des innovations de gestion. Parmi les compétences organisationnelles, celles liées à la création de nouvelles connaissances et à l'identification et évaluation du savoir individuel et collectif sont particulièrement insuffisantes. Dans une analyse critique des stratégies suivies, on peut soulever la question de la suffisance de ces actions face au développement de l'industrie chimique mondiale et des perspectives de transformation du modèle productif actuel. Pourraient les firmes pétrochimiques brésiliennes se lancer à la nouvelle frontière de matières premières renouvelables et énergétiques basées sur des biomasses, abondantes dans le pays et devenir des firmes innovatrices dans une nouvelle structure productive ?
Auteurs
Belbaly Nassim
Houzé Emmanuel
Résumé
Les projets de développement de nouveaux produits (NPD) nécessitent une stratégie efficiente afin de réduire le cycle de développement et répondre ainsi plus rapidement et d’une manière plus appropriée aux besoins des consommateurs. Alors que ces stratégies étaient au début avant tout pilotées par la technologie, de nos jours les entreprises adoptent des systèmes de gestion de connaissances (KMS) pour améliorer la création de nouvelles connaissances concernant leurs clients afin d’augmenter leur performance en terme de développement de nouveaux produits. Cette recherche s’intéresse donc à la manière avec laquelle les facteurs de KMS influencent les processus de création de connaissances clients et la réduction du cycle de développement des produits. En reliant les approches en terme de connaissances clients et de NPD, nous proposons un cadre d’analyse qui interconnecte les facteurs de KMS, les processus de création de connaissances clients et la performance en terme de NPD. Ce modèle a été testé empiriquement en utilisant un échantillon de 45 professionnels du secteur du développement logiciel utilisant des KMS afin de supporter le NPD. Les résultats montrent une influence significative des facteurs de KMS sur les processus de création de connaissances clients et sur la performance du NPD. Les implications tant pour la création de connaissances clients que pour la performance du NPD sont discutées.
Auteurs
Bignetti Luiz Paulo
Bomtempo José-Vitor
Résumé
À partir des années 1970, la politique de développement de la pétrochimie au Brésil a suivi un modèle centralisateur et fermé, tourné vers la substitution d’importations et le marché interne. Au départ, les stratégies d’innovation adoptées par les entreprises concernaient la qualification technologique, la maîtrise et le perfectionnement des processus productifs. Pendant près de vingt ans, les échelles de production furent capables d’obtenir des résultats positifs, dans la mesure où la rentabilité du secteur était assurée par le contrôle étatique des coûts de matières premières et des prix de vente, ainsi que par l’impossibilité d’importation de produits similaires de la part des clients. Avec l’ouverture du marché et les privatisations, les entreprises ont modifié leurs stratégies et privilégié les restructurations actionnaires et organisationnelles, les profits à grande échelle, les améliorations du processus et le développement de nouveaux produits, pour entrer en compétition sur le plan international. Le présent article étudie – à la lumière du modèle de l’équilibre ponctué – les transformations qui se sont produites dans les stratégies d’innovation des entreprises de première et deuxième génération du Pôle Pétrochimique de la Région Sud depuis le début des opérations, en 1982. Quarante-six cadres supérieurs (directeurs et gérants) de huit entreprises ont été interviewés en quatre occasions : 1992, 2004, 2005 et 2006. Le travail présente les épisodes successifs de turbulence et de stabilité qui se sont produits durant vingt-cinq ans : deux sont identifiées comme périodes révolutionnaires et deux comme périodes de stabilité. Dans chacune d’elles, les décisions stratégiques et les pratiques d’innovation sont analysées. Les résultats obtenus indiquent que les entreprises ont adopté des trajectoires d’innovation diverses, de la primauté des coûts à la modification des processus de production continue vers la production intermittente, avec l’objectif de développement de produits à plus grande valeur ajoutée.
Auteur
Simon Eric
Résumé
La menace que peut représenter le client est largement occultée dans les travaux en management stratégique mais aussi dans la vie des affaires. Souvent l'innovateur est conduit à traiter avec ses premiers clients alors que son innovation exige encore ajustements et mises au point. L’innovateur est alors particulièrement exposé par les ajustements nécessaires de son innovation et par son besoin de compétences complémentaires. Pour protéger les droits de propriété que lui reconnaît la société, l’innovateur doit engager des actions prophylactiques et réagir aux tentatives de captation de ces droits.
Le présent travail se propose de déterminer de quelle manière et dans quelles conditions les clients d’un innovateur peuvent s’approprier les bénéfices de l’innovation et quelles mesures les jeunes entreprises innovantes peuvent entreprendre pour se protéger.
Dans notre recherche, la génération de la théorie a été inscrite dans le cadre d’un raisonnement par abduction puis, nous avons créés des artefacts susceptibles d’être mis à l’épreuve. Construit « chemin faisant » le dispositif de recherche s’inscrit dans une perspective infirmationniste tout en présentant certaines caractéristiques propres à la recherche – action. Notre dispositif de recherche s’articule autour de 2 traditions de recherche souvent considérées comme incompatibles.
Enfin, ce travail a permis de mettre en évidence l'idée selon laquelle les petites entreprises innovantes courent un risque de spoliation réel avec leurs premiers clients puis, de montrer que ce risque peut-être minimisé. La base de compétences que nous avons modélisé peut devenir un outil de protection et de prévention de l’opportunisme.
Auteurs
Belleval Christophe
Lerch Christophe
Résumé
Dans ce papier, nous proposons de représenter les processus de conception innovants comme le cheminement dans un réseau de contradictions techniques, organisationnelles et cognitives. La conception de produits est un processus de résolution de problèmes impliquant des interactions entre plusieurs domaines. Cette conception va s’effectuer dans un cadre contraignant (généralement formalisé dans un cahier des charges), qui peut concerner non seulement les fonctionnalités du produit, mais aussi le déploiement et les moyens de l’organisation en charge de sa production, ou encore la technologie employée. Ces contraintes vont se révéler comme un élément moteur dans la finalisation du processus de conception. Cependant cette dernière prendra une orientation différente selon que les acteurs parviendront à résoudre le système de contraintes grâce à un arbitrage, ou en levant une ou plusieurs contradictions. Dans le cas contraire, on aboutit à un blocage pouvant déboucher sur la remise en cause du processus de conception.
Certaines contradictions sont d’ordre technique et leur résolution est susceptible de donner naissance à un nouveau produit; d’autres sont d’ordre organisationnel (conflits organisationnels) et leur résolution ouvre la voie à une nouvelle division et coordination du travail. Le troisième type de contradiction est d’ordre cognitif (dissonances cognitives), leur résolution peut donner naissance à de nouvelles croyances ou de nouvelles représentations individuelles et collectives.
En illustrant notre propos par une étude de cas portant sur un programme de microsatellites (Myriade, piloté par le Centre National d’Etudes Spatiales), nous montrons que ce mode de représentation a une portée praxéologique ; de plus, il permet de prendre en considération la diversité des situations tout en conservant la même structure au niveau de la démarche d’analyse.
L’objet intermédiaire de nature théorique que nous développons ici permet de plus au chercheur de caractériser l’activité innovante, de l’abstraire, et d’instaurer un débat contradictoire avec ses pairs à propos d’études de cas.
Auteurs
Van Horne Constance
Poulin Diane
Frayret Jean-Marc
Résumé
La capacité à innover des entreprises est nécessaire au maintien de leurs avantages concurrentiels et de leur croissance durable. La compréhension du processus d’innovation dans un contexte de centre d’expertise est quant à elle nécessaire à la fois pour la gestion des programmes de transfert des centres vers l’industrie, mais aussi pour les instances gouvernementales qui contribuent à la formation des conditions gagnantes de l’innovation.
Cet article a présenté un modèle du processus d’innovation basé sur la perception de la valeur de la connaissance innovatrice afin de mieux comprendre ses nombreux mécanismes complexes. Ce modèle souligne notamment les rôles tenus par les acteurs du processus d’innovation, ainsi que les valeurs qu’ils perçoivent et qui les motivent à prendre leurs décisions. La thèse défendue ici est que l’amélioration de la compréhension du concept de la création de valeur issue de la connaissance innovatrice permettra aux centres d’expertise et à leurs partenaires industriels de développer de meilleurs processus d’innovation et de meilleurs outils de transfert des connaissances et de la technologie.
Auteurs
Le Masson Pascal
Hatchuel Armand
Weil Benoit
Résumé
Certaines entreprises donnent aujourd’hui pour mission à leurs concepteurs l’exploration de ce que nous appelons des champs d’innovation : il s’agit d’explorer un potentiel de valeur, sans disposer ni de spécifications clients ni des compétences nécessaires. De telles missions sont clairement en contradiction avec les fondements du développement de produit. La littérature sur le fuzzy front end (FFE), le développement de produits flexible (FPD) et la gestion de l’innovation permet d’éclairer certains aspects de la gestion des champs d’innovation : les outputs ne peuvent être limités à des produits, les opérations élémentaires ne peuvent être restreintes aux étapes du NPD, à du prototypages ou à de l’essai-erreur. Mais comment mieux qualifier ces outputs et ces opérations élémentaires ?
Pour enrichir notre compréhension de la gestion des champs d’innovation, nous avons étudié six cas d’exploration réussie, dans des situations industrielles contrastées. Dans chaque cas nous avons analysé les outputs et les opérations élémentaires.
Le résultat principal est l’identification d’un nouveau type d’output que nous appelons une nouvelle stratégie d’innovation (NDS). Au-delà des produits développés, une NDS comprend un concept, des lignées de produits futurs et les compétences associées. En tant que stratégie, une NDS cadre l’action, et en particulier les NPD à venir. Mais dans une NDS, chaque action peut être la source d’apprentissages conduisant à la révision de la NDS elle-même. Une NDS est donc un cadre mouvant et un mouvement cadré. La gestion d’un champ d’innovation consiste à enrichir la NDS grâce à des explorations contrôlées, répétées, focalisées, visant à améliorer la variété, la valeur, l’originalité et la robustesse de la NDS.
Auteurs
Corbel Pascal
Fernandez Francis
Gendraud Pierre
Résumé
Le budget est généralement considéré comme l’un des relais classiques de la stratégie des entreprises au niveau opérationnel. Cet article examine les liens potentiels entre les buts stratégiques assignés aux brevets dans une entreprise et le budget consacré à la gestion de son portefeuille de brevets. Un panorama global des principaux rôles du brevet est d’abord présenté. Il a été dressé à partir d’une revue de la littérature académique spécialisée et surtout d’entretiens semi-directifs avec des professionnels de la propriété industrielle. Un ensemble de propositions tisse ensuite des liens entre ces différents rôles et la répartition du budget consacré aux brevets entre ses trois postes principaux : les dépôts, les extensions à l’étranger et les annuités liées à leur maintien en vigueur. La discussion qui s’ensuit porte à la fois sur les implications managériales d’un tel raisonnement et sur ses prolongations possibles en matière de recherche.
Auteur
Szostak Tapon Bérangère
Résumé
Une agence de design a pour mission d’être créative, tout en étant légitime pour accéder à des ressources nécessaires à sa survie. Ce papier cherche alors à expliquer sa légitimité à partir de sa créativité. Dans ce sens, nous nous appuyons sur les théories néoinstitutionnalistes, des réflexions conceptuelles sur la créativité organisationnelle et sur le design. L’objectif de la première partie est de construire les hypothèses de recherche en vue de leur test dans la seconde.
Dans un premier temps, nous utilisons la grille d’analyse de Woodman, Sawyer et Griffin (1993) pour expliquer en quoi une agence de design en tant que source de créativité est légitime dans son champ. Nous formulons ensuite trois hypothèses à partir de facteurs organisationnels caractérisant la créativité de l’agence. La première rappelle la possible coexistence de logiques institutionnelles dans un même champ. Dans le cas du design, trois logiques sont identifiées, d’où : plus une agence de design se réfère aux différentes logiques institutionnelles du champ, plus elle est légitime(H1). La deuxième hypothèse souligne la nécessité de la reconnaissance de la créativité, notamment par des prix, pour que l’agence soit reconnue comme créative. Ainsi, plus une agence de design a des reconnaissances, plus elle est légitime (H2). Une dernière hypothèse prend en compte la capacité de l’agence à travailler pour différents secteurs : plus une agence de design travaille pour des clients de secteurs variés, plus elle est légitime (H3).
La seconde partie procède à la construction des tests statistiques par régression linéaire multiple. Les données mobilisées sont tirées de la revue « Le guide des professionnels du design » de 2002. Pour des raisons de fiabilité, seules 68 agences constituent la base de données. Les trois hypothèses sont soutenues. Ainsi, la légitimité d’une agence est expliquée par sa taille (effectif), le montant de son capital, une forte étendue des valeurs institutionnelles, un grand nombre de reconnaissances et une diversité sectorielle de ses clients. Ces résultats nous conduisent à nous interroger sur les choix stratégiques des agences de design en matière de créativité. Jongler entre des valeurs institutionnelles diverses, concourir à de nombreux prix et s’enrichir des normes de secteurs différents supposent une rationalisation de l’activité créative des agences et du champ en lui-même.
Pour conclure, nous soulevons des pistes de recherche sur la place de la créativité dans les agences de design, en tant que PME. En effet, force est de reconnaître que certains critères majeurs favorisant la créativité positionnent la PME comme un cadre adapté à l’expression de la créativité : la liberté, le contrôle par l’individu impliqué de son travail, son autonomie… Par conséquent, comment une grande agence de design parvient-elle à concilier la liberté et l’autonomie d’une part, et, d’autre part, la rigueur nécessaire à la gestion fonctionnelle d’unegrande entreprise ? Est-ce que, finalement, les agences de design ne sont pas destinées à être de petite taille pour parvenir à remplir leur mission de générer de la créativité ?
Auteurs
Ayerbe Cécile
Mitkova Liliana
Résumé
Cette recherche vise à rendre compte des arrangements organisationnels au cours des différentes phases de la gestion des brevets, et ce dans le cadre d’une stratégie de valorisation externe à travers l’analyse du cas Thomson. Plusieurs travaux montrent que la gestion de l’activité d’invention ne saurait se réduire à la recherche et à sa protection. Elle dépend, au contraire, largement de la capacité de la firme à gérer l’ensemble des activités liées à la mise au point et à l’exploitation d’une invention protégée. Les recherches dédiées au management de l’invention reconnaissent à ce titre l’implication de nombreux acteurs et présentent des configurations organisationnelles adaptées à la gestion des brevets. Enjeux stratégiques et organisationnels apparaissent donc intimement liés. Pourtant, peu de travaux permettent de saisir précisément les différentes questions qui se posent à l’entreprise tout au long d’un processus qui va de l’émergence et du premier dépôt du brevet jusqu’à son exploitation effective. Encore plus rares sont les travaux qui permettent de comprendre les modalités organisationnelles adéquates au cours de ce processus et de les mettre en perspective avec la stratégie de valorisation retenue. Le cas Thomson, en raison des nombreuses évolutions organisationnelles et de sa politique offensive de valorisation des brevets apparaît particulièrement révélateur et permet de fournir des enseignements théoriques et managériaux sur les liens stratégie / structure liés au management de la propriété industrielle.
Auteurs
Corine Genet
Vincent Mangematin
Franck Aggeri
Caroline Lanciano
Résumé
Les acteurs, publics comme privés, conçoivent des stratégies de coopération pour développer de nouvelles compétences et avoir accès aux équipements nécessaires à une production scientifique de qualité. On assiste alors à un enchainement de décisions stratégiques prises par des acteurs hétérogènes pour investir dans les plates-formes technologiques et organiser les coopérations. A partir d’une analyse comparative des modes de fonctionnement de six plates-formes en sciences de la vie, le processus de formation des modèles d’activité, i.e. formation de l’offre d’instrumentation est étudié. Une comparaison des logiques de formation de l’offre par les plates-formes ou de construction des réponses à la demande d’instrumentation émise par les chercheurs permet de préciser les conditions de validité et de survie des plates-formes. Sont ensuite discutées les frontières entre un modèle de gestion publique des plates-formes, fondé sur une politique volontariste d'offre d'équipements scientifiques aux chercheurs, et un modèle économique privé de gestion des plates-formes. Ce texte montre que c’est la difficulté à définir une demande et à jouer un rôle moteur vis-à-vis des offreurs qui conduit les promoteurs de ces plates-formes à proposer une offre qui peine souvent à trouver son public.
Auteurs
Brion Sébastien
Favre-Bonté Véronique
Mothe Caroline
Résumé
Un consensus semble se dégager dans la littérature sur le fait que la survie des entreprises est de plus en plus conditionnée par leurs aptitudes à explorer de nouvelles pistes technologiques et, simultanément, à exploiter et rentabiliser au mieux les acquis dont elles disposent.
Cette double exigence (ou ambidextrie), déjà ancienne dans le champ du management de l’innovation, a été largement étudiée. Les recherches existantes sur l’ambidextrie (Tushman et O’Reilly, 1996 ; Gibson et Birkinshaw, 2004 ; He et Wong, 2004 ; Jansen et al., 2005) montrent le lien entre celle-ci et la performance des entreprises et insistent sur l’importance de mettre en place des structures séparées et différenciées, intégrées par les équipes de direction (Smith et Tushman, 2005). Toutefois, elles ne montrent pas concrètement comment articuler différenciation et intégration (Lawrence et Lorsch, 1973), n’analysent pas l’ambidextrie au niveau de la séparation des activités de recherche et des activités de développement et présentent les formes ambidextres comme « pures », alors que de nombreuses formes « mixtes » existent.
Cet article propose, à travers une recherche de type exploratoire menée au sein d’un groupe industriel français (SEB) lors de la mise en place d’un changement organisationnel, non seulement de décrire les différentes formes d’ambidextrie qui le compose mais également de contribuer à une meilleure compréhension des difficultés que rencontrent les groupes multi-activités pour maintenir un niveau élevé d’innovations à la fois d’exploitation et d’exploration. La question qui nous anime est donc la suivante : quelles formes d’ambidextrie mettre en place pour combiner les deux types d’innovation et s’inscrire dans un régime d’innovation continue ?
Nos résultats mettent en évidence deux apports majeurs. Premièrement, le groupe SEB combine plusieurs formes d’ambidextrie (contextuelle, structurelle et de réseau) et met peu à peu en place une forme d’ambidextrie hybride. Les différentes formes d’ambidextrie doivent être astucieusement combinées afin de parvenir à réaliser des innovations d’exploitation et d’exploration. Deuxièmement, le type d’ambidextrie structurelle adoptée par le groupe SEB, à savoir des structures séparées et autonomes distinguant d’un côté la Recherche, de l’autre le Développement, s’éloigne de l’ambidextrie structurelle telle qu’elle est définie dans la littérature (Benner et Tushman, 2003 ; Gibson et Birkinshaw, 2004 ; O’Reilly et Tushman, 2004). Nous terminons en proposant des mécanismes d’incitation et de management qui pourraient faciliter l’innovation continue dans des structures « multi-ambidextres ».
Auteurs
Lehmann-Ortega Laurence
Schoettl Jean-Marc
Résumé
Bien que la littérature sur l’innovation stratégique se soit largement développée au cours des dernières années, la compréhension du processus permettant de produire une telle stratégie reste floue, ce qui constitue l’objectif de cette communication. Nous illustrons ainsi par l’un des cas les plus étudiés, celui d’Ikea, le fait que l’innovation stratégique est par nature radicale, mais non nécessairement brutale. Le choix d’Ikea est délibéré et ne résulte pas d’un souci de simplicité ou de manque de créativité : réussir à illustrer ces caractéristiques pour ce cas d’école nous permet de suggérer qu’elles sont bien inhérentes à l’innovation stratégique.
Pour ce faire, nous définissons tout d’abord l’innovation stratégique comme l’introduction réussie dans un secteur d’un business model radicalement nouveau. Le business model comprend deux composantes majeures: la proposition de valeur pour le client d’une part et l’architecture de valeur (composé de la chaîne de valeur interne et externe) d’autre part, ces deux composantes se traduisant par une équation de profit qui doit être positive pour que l’innovation stratégique soit réussie. A partir de ces définitions, nous proposons un outil d’évaluation de la radicalité pour chacune de ces composantes, que nous appliquons à Ikea. Si la radicalité de l’innovation stratégique est ainsi établie, son caractère brutal est plus discutable. Selon la perspective adoptée (externe- ie le point de vue des concurrents- ou interne), l’aspect brutal, c'est-à-dire à la fois brusque et violent, doit être nuancé. Ainsi, en interne, l’innovation stratégique apparaît plus comme un processus d’apprentissage : un cumul d’expériences qui mises bout à bout donne naissance à la radicalité. Le rôle de ces expériences, appelées expérimentations stratégiques, est primordial dans la mise en oeuvre de l’innovation stratégique.
Auteur
Maltese Lionel
Résumé
L’approche Resource-Based View (RBV) est devenue un « classique » parmi les courants de pensée en stratégie d’entreprise. A la fois très largement explorée et exploitée ces quinze dernières années (Rouse et Daellenbach, 1999) et très controversée (Priem et Butler, 2001), de multiples extensions se sont développées avec principalement des travaux conceptuels. C’est le cas d’un courant initié par Mahoney (1995) et récemment approfondi par Sirmon et al. (2007) concernant la perspective du fonctionnement des modes de management du portefeuille de ressources d’une firme. C’est dans ce prolongement que nous situons cette recherche empirique menée auprès de managers d’organisations événementielles sportives de 2001 à 2006. Notre objectif est la proposition de nouveaux outils d’analyse du management d’un système d’actifs complexe et évolutif ainsi que d’un nouveau mode opératoire basé sur une instrumentation en deux étapes.
Selon cet objectif, nous tenterons de comprendre comment sont manipulés les actifs d’un événement. Plus précisément, il sera question d’expliciter le rôle des « managers d’actifs » par la mise en relief de leurs aptitudes à l’apprentissage et au bricolage conçues en tant que leviers d’action à la construction d’un système unique de ressources (Koenig, 1999).
Les principaux résultats montrent que les aptitudes managériales à la manipulation des actifs au sein d’un système unique sont essentielles mais difficilement modélisables. Les axes de fortification par l’apprentissage, permettant notamment le contrôle des effets de seuil et l’exploitation des engrenages entre ressources, et de réinjection, gage de renouvellement et d’évolution d’un système interne structuré, peuvent être considérés comme de nouveaux outils analytiques du management des ressources (Sirmon et al, 2007).
Auteurs
Schroeder dos Santos Luciana
Bandeira-de-Mello Rodrigo
Résumé
Au Brésil, l'étude sur le processus du changement stratégique organisationnel, en général, ne considère pas les implications du changement dans la performance organisationnel. À son tour, les études qui ont comme objectif expliquer les variations de performance ne considèrent pas le processus du changement stratégique sous-jacent. Cette étude essaie de suppléer cette lacune théorique dans la mesure où elle fournit une explication pour le changement stratégique des entreprises qui possèdent l'avantage concurrentiel par rapport aux adversaires dans un environnement hostile comme celui du Brésil. On a développé une étude de cas simple avec l’intention de production d’une théorie enracinée par la méthode de la Grounded Theory, associée à une approche processuelle et contextuelle sur l'étude du changement stratégique. À partir de la perception des dirigeants d’une entreprise, Embraco, qui historiquement produit des rentabilités supérieures dans le secteur métal-mécanique brésilien, on a développé un ensemble de propositions de comment et pourquoi la compagnie change ses stratégies. Contrairement à la littérature au sujet de l’adaptation dans les environnements hostiles, la compagnie étudiée n'a pas fondé ses stratégies dans le rapprochement avec le gouvernement, ni a adopté une attitude réactive. Le cas a révélé que les stratégies de succès ont protégé la compagnie contre les hostilités de l'environnement. Deux stratégies se sont montrées importantes: l’engagement dans l'accumulation d'une capacité technologique supérieure et la mondialisation des affaires.