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Leroy Daniel

Auteur

Leroy Daniel

Résumé

Le recours croissant à des structures temporaires de type projet est un phénomène largement relevé par la littérature managériale. Il se manifeste par de nombreux indices convergents : multiplication des publications et salons professionnels, foisonnement de l’offre de formation et de consultance, développement des associations professionnelles, diffusion de référentiels, de normes, de modèles dits de « maturité », etc. Des travaux plus académiques récents attestent d’une institutionnalisation du mode projet qui donnerait lieu à l’avènement d’une nouvelle « cité des projets », d’une « économie de projets »….
Cependant, la cartographie du management de projets reste encore très parcellaire et fragmentée, détaillant ici des cas symboliques en profondeur, ailleurs une thématique particulière dans un secteur donné (co-développement, management de l’innovation, management des connaissances), là des méthodes ou outils particuliers. En l’absence de perspective d’ensemble, il devient épineux de vérifier l’hypothèse d’institutionnalisation du mode projet.
Nous proposons de mobiliser les données collectées dans le cadre d’une recherche longitudinale sur les pratiques effectives en management de projets initiée depuis 1997.
Deux échantillons homogènes couvrant les périodes 1997-1998 et 2004-2006 ont été constitués et analysés de manière à tester le pouvoir explicatif du courant néo-institutionnaliste, notamment la dynamique d’isomorphisme (coercitif, mimétique et normatif) et de « légitimation ». Des indicateurs ad hoc ont été élaborés pour tenter d’apprécier si l’institutionnalisation du mode projet conduit à une réduction de la polysémie de la notion de projet, à une plus forte utilisation des outils du management de projet. De même, nous avons cherché à savoir si le mode projet est une réponse possible à l’ambiguïté des buts et à l’incertitude technologique et comment les entreprises adoptant le mode projet internalisent-elles les « pressions normatives ».
Les résultats montrent que l’on peut répondre clairement par l’affirmative aux trois premières questions. Ils montrent cependant une ligne de clivage forte entre deux modèles de conception de projet, celui de l’orthodoxie de la gestion de projets (triangle coût-délai-qualité) adopté principalement par les participants à des projets « externes » et celui du « changement » adopté majoritairement par les participants à des projets « internes ». Les variables les plus explicatives des pratiques de projet ressortent du degré d’institutionnalisation des organisations étudiées et du degré d’institutionnalisation du management de projets lui-même. Certains « prédicteurs d’isomorphisme » tels que la taille, le secteur d’activité, la fonction occupée, l’incertitude technologique et l’ambiguïté des objectifs, le degré de professionnalisation en projet, la dépendance vis-à-vis de l’Etat, etc. sont testés et discutés. Les vecteurs de diffusion de la culture projet le sont également.
Au final, il ressort qu’à la singularité initiale du concept de projet répond la prégnance des processus d’institutionnalisation tout comme le management par projets tente de concevoir et de développer des processus d’intégration à la mesure de la différenciation induite par les différents projets en cours et à venir au sein des organisations.