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Mailhot Chantale, Mesny Anne

Auteurs

Anne Mesny

Chantale Mailhot

Résumé

Cet article a pour but de nourrir et de clarifier le débat au sujet de la collaboration entre chercheurs et praticiens de la gestion, collaboration qui est souvent invoquée pour répondre à la « crise d’utilité » des connaissances issues de la recherche en gestion, qui semble sévir en Europe comme en Amérique du Nord. Le point de vue adopté est d’abord épistémique, dans la mesure où nous explorons la littérature sur les pratiques de collaboration à partir de trois thèmes-clé : le statut accordé aux « praticiens » dans la collaboration, les liens qui sont établis entre collaboration, utilité et scientificité des connaissances, et les différences de nature faites entre les connaissances des chercheurs et les connaissances des praticiens. Selon les pratiques de collaboration considérées, les praticiens de la gestion sont traités [a] comme des objets à étudier et des pourvoyeurs de données, [b] comme des personnes « immergées » dans leur pratique, que les chercheurs peuvent contribuer à émanciper, [c] comme des experts à outiller et des « consommateurs » de connaissances, ou [d] comme des commanditaires ou des parties prenantes à satisfaire. La collaboration avec les praticiens permet, selon les points de vue, [a] d’augmenter la scientificité des connaissances, [b] d’augmenter l’utilité des connaissances, au risque d’être moins scientifique, ou [c] d’être à la fois plus scientifique et plus utile. Enfin, les différences entre connaissances des chercheurs et connaissances des praticiens renvoient à trois oppositions possibles : [a] l’opposition entre science et sens commun, [b] l’opposition entre connaissances explicites et connaissances tacites, ou [c] l’opposition entre connaissances actionnables et connaissances appropriées. À partir de ces trois pivots épistémiques, nous dégageons quatre grands modèles de collaboration : le modèle naturaliste, le modèle humaniste, le modèle ingénierique et le modèle marchand. Finalement, nous élaborons notre propre position en proposant des éléments de réponse aux questions suivantes: Quel(s) statut(s) devrait-on accorder aux praticiens si l’on veut vraiment « collaborer » avec eux? En quoi la collaboration chercheurs / praticiens est-elle liée à l’utilité et la scientificité des connaissances en gestion? Comment concevoir les connaissances des chercheurs et les connaissances des praticiens? Quel(s) modèle(s) de collaboration privilégier?