Un nombre croissant d’organisations évolue au sein d’environnements complexes, marqués par une forte incertitude. Dans de telles conditions, le stratège peut éprouver certaines difficultés à anticiper les évolutions qui pourront affecter l’organisation et à agir afin d’en absorber les effets. Le stratège évoque une catégorie d’acteurs qui contribue à la définition de la stratégie en influençant la construction des pratiques stratégiques. Face à la complexité de leur contexte d’action, les stratèges peuvent percevoir les Technologies de l’Information et de la Communication (TIC) comme des outils d’aide à l’anticipation. L’objectif de cet article est de comprendre comment les usages de technologies particulières, les technologies de collaboration, affectent les capacités d’anticipation et d’adaptation des stratèges. Pour ce faire, nous nous appuyons sur des données recueillies pendant une année dans le cadre d’une étude commandée par le Ministère français de la Défense et analysons l’impact des TIC sur la conduite des opérations militaires centrées réseaux. Plus spécifiquement, nous portons notre attention sur la façon dont les militaires de l’OTAN déployés sur le sol Afghan utilisent les technologies de collaboration du type text chat. L’analyse du cas fait émerger deux résultats principaux. D’une part, les utilisateurs de la technologie articulent certaines propriétés offertes par la technologie au regard de leurs besoins sur le terrain. La relation technologie/usages repose alors sur la combinaison de trois propriétés spécifiques : des fonctions technologiques, des processus cognitifs et des types de connaissance. D’autre part, certains types d’usages combinés peuvent générer des effets non anticipés sur les capacités d’anticipation et d’adaptation des utilisateurs de la technologie. Nos résultats montrent notamment que l’interaction technologie/usages est susceptible de renforcer certaines formes de complexité déjà présentes dans l’environnement, voire d’en créer de nouvelles (comme la surcharge informationnelle ou encore les biais perceptifs et interprétatifs). Dans la discussion, nous insistons sur le fait la relation technologie/usages n’est ni univoque, ni déterministe et que l’organisation peut obtenir un avantage stratégique en développant des compétences à partir des combinaisons d’usages mises en œuvre par les acteurs sur le terrain. L’enjeu pour le stratège est alors de trouver un équilibre entre contrôle des usages, maîtrise des effets non anticipés et incitations à l’expérimentation et à l’énaction de la technologie.
Dans la littérature économique, les transactions de transferts de technologie ont toujours été considérées des réunions de contradiction : les efforts du licencieur visant à modérer le comportement opportuniste d’un partenaire portent inévitablement atteinte aux possibilités d’apprendre et d’innover existant au sein d’une transaction. Nous étudions ici un échantillon récent de 237 accords de licence technologique couvrant différentes industries dans des pays variés et nous montrons que les entreprises conçoivent la structure de leurs relations de coopération de façon à restreindre l’inclinaison des partenaires à agir de manière opportuniste et à d’exploiter pour ses intérêts privées une information échangée lors de la transaction. D’autre part, la structure est aussi conçue pour ne pas limiter les possibilités d’innovation et de recherche encastrées dans ces relations. Nous démontrons ce point en créant un indice intégral mesurant le nombre des fonctions transmises du licencieur au licencié, qui permet d’illustrer l’effet d’apprentissage d’un accord de transfert de technologie et de montrer son effet positif sur le choix des mécanismes spécifiques de gouvernance par le licencieur. Nous ne trouvons aucune confirmation à l’hypothèse d’accords de licence technologique plus vastes dans les droits accordées au licencié lorsque les deux partenaires appartiennent à un projet de coopération technologique plus vaste ou complexe (par exemple un projet de co-développement de technologie). Par contre nous validons partiellement l’idée de la substituabilité des mécanismes formels de gouvernance par des mécanismes plus informels. Nous montrons aussi qu’une précédente expérience de licence entre les deux partenaires les conduit à optimiser leurs coûts de transaction, en économisant sur la mise en oeuvre de mécanismes formels et explicites de gouvernance, ainsi qu’en s’appuyant sur les mécanismes relationnels.
Dans le prolongement des travaux de Venkatraman & Prescott (1990), d’Anderson (1990), de Hoffmann & Schlosser (2001) et de Beamish & Kachra (2004), notre travail de recherche propose une analyse de l’impact de 25 variables managériales dans l’émergence et la conduite des alliances stratégiques. Nous tentons de mesurer le rôle que joue la perception de la performance escomptée d’une alliance stratégique sur l’attrait que peut représenter celle-ci pour les managers en termes d’engagement.
Nous présentons les résultats d’une analyse empirique portant sur 40 alliances stratégiques. Nous utilisons une méthode qualitative de données convoquant une approche à la fois « interprétativiste » et « perceptiviste » de la performance.
Nos résultats permettent de réduire le modèle général de l’engagement des alliés à deux axes drainant l’essentiel des variables d’émergence et de conduite des alliances fondées sur une performance perçue et multidimensionnelle.
Nos observations empiriques établissent une prédominance des modèles transactionnels et institutionnels. Elles focalisent l’analyse sur trois variables discriminantes qui nous permettent de tirer des conclusions en faveur d’une bonne gouvernance des alliances. Ces dernières favorisent: (1) les partenariats en réseau impliquant un grand nombre de partenaires, (2) des cadres d’action formels significatifs où la conclusion et la conduite des alliances seraient strictement encadrées juridiquement, et (3) un engagement fort des managers, notamment basé sur la légitimité des partenaires. Nous concluons ce travail par des cadres d’implication généralisables où le concept de « club » que développait déjà Buchanan en 1965 (une relation « Leadership / Membership ») laisse émerger un contexte d’engagement et de légitimité favorable à la conclusion et à la pérennité des alliances stratégiques.