Ce papier examine comment l’innovation s’effectue dans les réseaux qui mettent en relation les entreprises et les communautés d’utilisateurs. À partir de la littérature sur l’innovation d’utilisateurs, la créativité et la théorie de la traduction, nous identifions un double processus qui soutient l’innovation, la décontextualisation et la recontextualisation. Nous illustrons ensuite ces processus dans trois études de cas, UserInnov, Freebox et Trackmania afin de déterminer les mécanismes qui les soutiennent et en déduire la manière dont l’entreprise peut gérer les liens avec une communauté d’utilisateurs pour innover.
Le Web 2.0 se caractérise par une évolution des rôles des créateurs professionnels de sites Web : ils ne sont plus de simples créateurs de contenu mais des gestionnaires de plateformes. Ces nouveaux acteurs économiques doivent développer un business model prenant en compte l’ambivalence qui fait de l’utilisateur à la fois un consommateur et un créateur de valeur pour la plateforme. Cet article propose une mise en relation du concept de business model et de la théorie économique récente sur les marchés bifaces afin d’éclairer de manière renouvelée la réflexion stratégique de ces gestionnaires de plateformes Web 2.0..
L’originalité de cette recherche consiste à mettre à l’épreuve du terrain le cadre théorique proposé à travers un cas réel de développement d’une plateforme Web 2.0 créée et gérée par le premier co-auteur de cet article. La première partie de l’article propose un cadre théorique de réflexion stratégique sur les business models des plateformes en intégrant, pour chaque élément du business model (proposition de valeur, ressources et compétences, réseau de valeur, modèle de revenu), les spécificités des marchés bi-faces, et notamment les effets d’externalités de réseau. La partie 2 présente le cas de la plateforme Sportganizer, un service Web destiné aux associations sportives, ainsi que le raisonnement stratégique du créateur pour élaborer un business model innovant.
Les résultats de cette recherche conduisent à différencier les plateformes Web 2.0 selon qu’elles appliquent une proposition de valeur similaire ou spécifique sur chacune des faces de leur marché. L’intérêt d’une telle distinction est de démontrer aux gestionnaires de plateformes appartenant à la seconde catégorie qu’ils peuvent innover sur chacune des faces de leur marché, tant la face subventionnée que la face payeur, souvent négligée. Le cas de Sportganizer, la plateforme étudiée, illustre cette possibilité.
D’un point de vue théorique, l’article apporte un renouvellement de la perspective des business models pour les plateformes du Web en intégrant les apports de la théorie des marchés bi-faces. Il suggère en outre que la théorie des marchés bi-faces pourrait intégrer une perspective de la valeur plus sophistiquée que le rapport prix / volume de transactions développé dans la théorie économique, en considérant notamment la valeur sociale d’appartenance à une communauté et la valeur de la connaissance apportée par les internautes sur les plateformes.
Les firmes entrepreneuriales fondées sur la Connaissance connaissent des débuts difficiles car elles sont entrepreneuriales simultanément sur plusieurs dimensions. Ces firmes peuvent-elles compter sur les utilisateurs pour proposer une efficacité suffisante dans certaines dimensions entrepreneuriales ? Pour répondre à cette question nous nous reposons sur les théories entrepreneuriales de la firme et sur la littérature traitant de l'utilisateurs-innovateur. Dans ce travail nous présentons le cadre de l’entreprenariat pluriel. Puis à partir d’une étude de cas longitudinale dédiée à une firme du jeu vidéo pour téléphone mobile qui compte sur les utilisateurs pour développer leurs jeux, nous montrons que l'utilisateur peut améliorer de façon significative l'efficacité de l'innovation de la firme. Nous montrons aussi que les autres dimensions importantes de la firme (l'organisation, le modèle d'affaires) peuvent être de façon significative améliorées par l'implication d'utilisateurs.