Ces dernières années, un nombre croissant d’entreprises ont commencé à impliquer leurs clients dans le design, la production et / ou la distribution de leurs produits et services. Même si les objectifs de ces firmes sont multiples, il est possible de les séparer en deux grandes catégories : augmenter leurs revenus, ou diminuer leurs coûts. Cette tendance vers une intégration accrue du client est révélatrice de nouveaux choix organisationnels faits par les entreprises pour générer des marques plus importantes. Cela se traduit par des changements fondamentaux dans leurs modèles économiques. En effet, il est impératif de réfléchir à la manière dont le client peut être mobilisé, et donc de quelle façon il peut être intégré dans le modèle économique. Néanmoins, malgré une évolution récente, le concept de business modèle est resté relativement peu étudié dans la littérature académique (Demil et Lecocq, 2008). En particulier, il semblerait qu’aucune étude n’ait abordé à ce jour la place et le rôle du client dans le modèle économique. Or, il nous paraît essentiel de développer ce type de recherche, étant données la multiplication des preuves empiriques de cette évolution. Pour ce faire, il convient de dépasser la perspective traditionnelle du client tel qu’il est abordé dans la littérature sur le modèle économique (par exemple, Chesbrough et Rosenbloom, 2002), i.e. un simple acheteur.
Dans cette optique, nous proposons de nous appuyer sur la littérature en marketing et management des services. Celle-ci a abondamment traité de la manière dont le client prend part aux activités de conception, production et / ou distribution, par le biais du concept de participation client. Toutefois, un très large pan de cette littérature met l’accent sur l’impact du client sur l’amélioration de la qualité, de la satisfaction ou de la fidélisation. En outre, même lorsque la participation du client est abordée à travers un prisme organisationnel, il s’agit essentiellement de montrer de quelle mensure cela peut permettre d’obtenir un avantage concurrentiel (Vargo and Lusch, 2004). En revanche, la capacité de l’entreprise à générer des revenus à partir de la participation client nous semble encore inexplorée.
Dès lors, cet article vise à contribuer à une meilleure compréhension de la place et du rôle du client dans le modèle économique. En combinant les littératures sur le modèle économique et la participation client, nous développons un cadre conceptuel que nous appelons « Customer-Integrated Business Model » (CIBM). Ce modèle s’ancre dans le modèle RCOA (Ressources et Compétences, Offre, Activités) développé par Lecocq et al. (2006). Le CIBM considère le client comme une ressource de l’entreprise. Une telle perspective a deux répercussions majeures sur les deux autres composants (l’offre et les activités), ainsi que sur les interrelations entre les trois parties de ce modèle. Nous illustrons ce cadre théorique par deux études de cas basées sur des données secondaires. Nous concluons en soulignant les limitations potentielles du CIBM.
Les systèmes de franchise sont des business models (BM) difficiles à manager, et obtiennent des performances très variables qui remettent souvent en cause leur viabilité. Dès lors, la plupart des franchiseurs développent des mécanismes de diversification de leurs sources de revenus pour ne pas dépendre exclusivement des ressources générées par ce système. En effet, la mixité des réseaux est aujourd’hui un phénomène normal. Certains franchiseurs choisissent même de réintégrer les points de vente franchisés.
Depuis quelques années, le recours au e-commerce constitue une opportunité pour les franchiseurs dans leur démarche de diversification des sources de revenus. Plus globalement, les technologies de l’information et de communication, notamment Internet, offrent de nouvelles perspectives aux chaînes de franchise. Mais si le e-commerce constitue une opportunité pour les franchiseurs, il présente aussi des défis légaux, commerciaux et organisationnels.
Le e-commerce est un business model très populaire depuis le développement de la bulle Internet. Dans le cadre des chaînes de franchise, il offre aux franchiseurs un BM alternatif. Mais la question est de savoir comment gérer deux BM potentiellement source de conflit ?
Traditionnellement, une telle question est traitée suivant une approche de stratégie de distribution multi-canal. Nous proposons dans cet article d’analyser cette question sous l’angle stratégique à travers le concept de business model en mobilisant le modèle RCOA (Warnier, Demil & Lecocq, 2006 ; Demil & Lecocq, 2008). La confrontation des modèles RCOA du système de franchise et de l’e-commerce, et l’examen de plusieurs cas de chaînes de franchise qui ont adopté le e-commerce, nous permettent de démontrer l’existence de sources de synergies entre les deux business models mais également les problèmes d’intégration à résoudre.
Le secteur des jeux vidéo (consoles et jeux) est devenu à la fin de la décennie 1990 une composante à part entière de l’industrie des loisirs et du divertissement (Entertainment) au même titre que le cinéma et la musique et enregistre une croissance spectaculaire. Depuis le début des années 2000, cette industrie est marquée par des évolutions majeures : l’arrivée de Microsoft en 2001 sur le segment des consoles déjà occupé par les deux firmes nippones Sony et Nintendo, un intérêt croissant des éditeurs de jeux pour d’autres plateformes, l’émergence de nouveaux supports et le développement rapide des jeux en ligne. Tous ces éléments ont un impact fondamental sur la chaîne de valeur et sur la stratégie des acteurs déjà présents et des nouveaux entrants. Ce secteur est caractérisé par une complexité technologique croissante des consoles de salon (cycles) et une tendance structurelle à la hausse des coûts de développement des jeux. En outre, l’industrie du vidéo présente quelques spécificités : c’est une industrie de plateforme caractérisée par l’existence d’externalités de réseau croisées qui impliquent de la part des fabricants de consoles la capacité à concilier les intérêts des deux versants du marché, ceux des développeurs d’une part, et ceux des joueurs d’autre part. Dans cette perspective, la proposition de valeur faite à ces deux communautés doit être suffisamment attractive pour enclencher les externalités croisées. De fait, leur capacité à générer des revenus dépend de leur aptitude à concilier les intérêts de deux communautés d’acteurs spécifiques complémentaires. De ce point de vue, les business models de Sony et de Microsoft sont relativement proches l’un de l’autre. Mais le business model renvoie également à la question des ressources et des compétences à mobiliser par les entreprises pour élaborer leur offre et aux caractéristiques de cette offre. Sur ce point, nous montrerons qu’il existe des différences importantes.