AIMS

Index des auteurs > Huault Isabelle

Huault Isabelle, Perret Véronique

L'objet de cet article est de spécifier la nature et les contours d'une activité critique dans le champ de la stratégie. Alors que les analyses dites post-rationnelles ou processuelles ont offert des alternatives au courant conventionnel en stratégie, elles ne rendent pas compte de la spécificité de l’approche critique et ne s’inscrivent pas dans le projet d’une théorie critique du management stratégique. Elles ont certes introduit le thème du pouvoir, mais ont peu insisté sur les phénomènes de domination. Elles ont par ailleurs intégré le rôle des discours mais sans insister sur l'importance de celui-ci dans les processus de subjectivation. Elles ont enfin été soucieuses de réflexion sur la définition du périmètre de la stratégie, mais ont échoué à mettre en oeuvre une réflexivité radicale. Au travers de l’examen des quelques travaux existants proposant une approche critique du management stratégique, ce papier explore la manière dont l'analyse critique peut se saisir de problématiques-clés en management stratégique, en dépassant la perspective post-rationnelle et en proposant un agenda de recherche résolument critique pour la discipline.

Blanc Antoine, Huault Isabelle

L‟institution, par définition, reflète une notion de persistance. Elle cadre durablement la pratique des acteurs à travers un ensemble d‟éléments réglementaires, normatifs et cognitifs. Par ailleurs, cette persistance n‟est pas le résultat d‟un pur effet institutionnel. Elle s‟explique aussi, en grande partie, par un travail institutionnel : certains individus s‟engagent dans un ensemble d‟actions afin de participer à la reproduction des institutions et de l‟ordre établi. Ces actions de maintien sont cruciales pour instruire la question de persistance des institutions, mais restent cependant quasiment inexplorée dans la littérature institutionnelle. Dans cette étude, nous traitons la question du maintien en accordant une attention particulière à l‟agence des individus. Certains acteurs ont intérêt à maintenir l‟ordre institutionnel, ce qui se traduit par des efforts pour reproduire des croyances et schémas de pensée. Le discours comme objet d‟analyse est ici central pour étudier les efforts sur les croyances et schémas cognitifs, d‟autant plus que les institutions sont, à plusieurs égards, des constructions sociales discursivement constituées. Cet article se propose ainsi d‟explorer les processus agentiels qui participent à la reproduction de l‟ordre institutionnel. Plus spécifiquement, nous étudions les travaux discursifs des acteurs dominants visant à stabiliser croyances et significations. Dans ce dessein, nous nous intéressons à un cas unique, celui de l‟industrie musicale en France où la stabilité du champ est remise en question avec le développement d‟Internet. Le projet de « licence globale » offre un potentiel important de changement, et laisse apparaître des efforts pour maintenir le système existant. Nous avons réalisé une étude longitudinale portant sur un corpus de textes de 2004 à 2008 produits autour de la question de « licence globale » et sur une série d‟entretiens. Une analyse discursive lexicométrique, avec le logiciel Alceste, a permis de mettre en évidence, dans le discours des Majors, la manipulation et le renforcement des croyances existantes à travers la circulation, l‟association et la répétition de certains mots. En particulier, nous mettons en évidence le travail discursif opéré sur la notion d‟artiste. La dimension marchande de l‟artiste est renforcée et naturalisée pour reproduire l‟ordre existant malgré un environnement instable.