AIMS

Coche Christophe
Structures Familiales et Gouvernement de l’Entreprise Familiale

D'un point de vue théorique, la théorie de l'agence a souvent été utilisée pour décrire et analyser les mécanismes de la gouvernance d'entreprise dans les entreprises familiales, le plus souvent en comparaison par rapport aux entreprises non familiales. Récemment d'autres perspectives théoriques ont été mobilisées afin de comprendre la gouvernance d'entreprise dans ces organisations: théorie de la dépendance des ressources (Pfeffer et Salancik 1978), théorie de l'intendance (Davis, Schoorman et Donaldson, 1997), théorie institutionnelle (Di Maggio et Powell, 1983 ) ou des réseaux sociaux (Gulati et Gargiulo, 1999). Mais dans de nombreux cas, la dimension familiale de l’entreprise familiale paraît finalement peu prise en compte (Dyer 2003, Sharma 2004) et les recherches apparaissent plus descriptives qu’analytiques. Des développements récents ont inclus dans leurs analyses la question de la qualité des liens familiaux (Schulze, Lubatkin et Dino 2003; Labaki 2007), en termes d'altruisme et d’intensité des relations entre les membres de la famille. Il reste cependant beaucoup à faire pour mieux comprendre la dynamique des entreprises familiales en matière de gouvernance. Notamment en ce qui concerne le rôle de la famille appréhendée comme une organisation et comme une institution dotée de ses propres codes, règles, mécanismes de gouvernance. Au final les auteurs ont souvent appréhendé la relation entre la famille et l'entreprise de manière restrictive. Le défi consiste à analyser et à déterminer dans quelle mesure la présence d'une famille dans sa structure d'actionnariat et/ou sa gestion influence et détermine l'entreprise. Ce travail s’inscrit dans une telle démarche. Suivant Gilding (Gilding 2000), nous pensons que nous ne pouvons pas comprendre la gouvernance des entreprises familiales sans une réelle prise en compte de la dimension familiale, des mécanismes qui régissent la famille et son évolution. Pour ce faire, l’article dresse dans une première partie un état de lieux de la recherche en gouvernement d’entreprise sur l’entreprise familiale, afin de mettre en avant certaines spécificités de cette dernière. Il en ressort que la littérature souffre d’une insuffisante prise en compte de la dimension familiale. Le cadre d’analyse de la gouvernance familiale proposé par l’anthropologue Emmanuel Todd est alors mobilisé pour tenter de remédier à cette carence. Il s’agira alors de voir en quoi ce modèle peut être pertinent pour mieux comprendre la dynamique et les différences entre entreprises familiales en matière de gouvernement d’entreprise. Cette seconde partie nous conduira à formuler quelques propositions qu’il conviendrait de tester.