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Simon Fanny, Tellier Albéric

Le développement continu de produits innovants est souvent considéré comme un facteur clé de la compétitivité des organisations. Plusieurs auteurs s’interrogent ainsi sur les dispositifs propices à la production d’innovation « en rafale ». Or, la plupart des innovations n’émergent pas de façon isolée mais s’inscrivent au contraire dans une « lignée » : elles se développent sur la base d’innovations préexistantes et peuvent par la suite en générer d’autres. L’objectif de cet article est de contribuer à l’analyse de ces « routes d’innovations » (Tushman et al., 1997) qui peuvent conduire la firme, sur une période donnée, à des innovations incrémentales ou radicales. Le niveau d’analyse retenu est celui des équipes-projets. En effet, les générations successives d’innovations peuvent être considérées comme un flux continu de projets entrelacés, qui partagent plus ou moins des ressources ; certaines équipes transitant d’un projet à l’autre. Nous posons d’emblée que les relations entre les individus impliqués dans les projets d’innovations vont influencer à la fois la diffusion et l’acquisition de connaissances. La théorie des réseaux sociaux qui s’intéresse aux configurations relationnelles et à la position des individus dans des ensembles de relations peut dès lors être mobilisée pour comprendre dans quelles conditions s’effectuent la création et la recombinaison de ces connaissances. Peut-on identifier une relation entre les caractéristiques des configurations sociales et les processus de création, transfert ou recombinaison de connaissances nécessaires aux rafales d’innovation ? Nous considérons un cas particulier : le développement de générations successives de circuits intégrés permettant la réception de chaînes de télévision sur différents supports. Nous considérons les réseaux d’acteurs associés au développement de cette série d’innovations au sein d’un centre de R&D d’un fabricant de semi-conducteurs, de 2000 à 2010. Nous nous intéressons particulièrement à l’évolution de la centralité des acteurs et à la structure des réseaux. Cette recherche montre que les structures sociales doivent évoluer pour répondre aux impératifs successifs des innovations d’exploration et d’exploitation. Ainsi, si des relations nouvelles avec des clients vont favoriser les innovations de rupture dans un premier temps, ce seront des relations établies qui permettront les innovations suivantes d’exploitation. Il apparait également que le renouvellement des membres composant la périphérie du réseau permet les transferts de connaissances nécessaires à la génération de nouvelles innovations. Similairement, la forte centralité du réseau semble surtout néfaste lors de la phase liée à l’exploration de nouvelles technologies et marchés.