AIMS

Risque Incertitude et Management - 2024 à 2027

Responsables :

 
No-photo
Nour Kaanan IAE Lille
 
No-photo
Geoffrey Leuridan IMT Atlantique
 
No-photo
Julie Mayer Université de Rennes
 
No-photo
Véronique Steyer Ecole Polytechnique


Objet du groupe thématique :

 À la suite de la première période du GT « Les organisations face aux risques émergents » (voir document de bilan), nous souhaitons organiser la poursuite de notre réflexion au sein du GT autour des quatre thématiques suivantes : Thème 1 : Renouvellement des représentations du risque et des incertitudes face aux défis contemporains Dans le domaine des sciences de gestion, l’émergence de nouvelles catégories telles que les « grand challenges » les « wicked problems » ou les « risques émergents” ne marque pas uniquement l’avènement d’un monde de plus en plus incertain (Grint, 2022), A l’heure de l”Anthropocène”, nos modes d’organisations sont de plus en plus remis en question par la reconnaissance des conséquences en partie irréversibles des activités humaines sur le système-Terre. La reconnaissance dans le monde académique de l’existence de “limites planétaires” (Rockström et al., 2009) bouscule les paradigmes sur lesquels sont fondées nos organisations (Heikkurinen et al., 2021 ; Nyberg et al., 2022) : quels intérêts servent-elles ? Sont-elles vouées à croître indéfiniment ? Quel rapport entretiennent-elles avec la nature ? Autant de bouleversements conceptuels - voire ontologiques, pour lesquels les notions de risque et d’incertitude sont centrales. Le caractère systémique des défis à relever par les organisations nécessite alors de repenser nos façons de concevoir et d’appréhender ces concepts. Les approches de la construction sociale du risque (Maguire & Hardy, 2013; Hilgartner, 1992) offrent un point de départ prometteur, en s’intéressant aux processus sociaux par lesquels les sociétés construisent leurs représentations des risques, et définissent des modalités d’action associées. Le GT RIM s’intéressera ainsi à la façon de repenser et enrichir les connaissances théoriques autour de la représentation du risque et des incertitudes. En particulier, il s’agira d’explorer comment les organisations peuvent naviguer à travers de multiples niveaux d’analyse, pour appréhender les relations complexes qui structurent leur environnement. Là où de nombreuses approches de la gestion des risques visent à réduire l’incertitude, il s’agira également de comprendre comment elles peuvent agir sous incertitude. Enfin, les contextes d’urgence (climatique, géopolitique, sociale, sanitaire...) que nous traversons amènent également à des transformations dans les relations de pouvoir et de légitimation (entre Etats, entre entreprises d’un secteur, entre des professions, etc.). Comprendre comment, au nom de la gestion des risques, se (ré)agencent les organisations constitue également un agenda de recherche prometteur. Ainsi, ce premier thème couvrira notamment les questions suivantes : - En quoi les risques “émergents” bousculent-ils les modes d’organisation établis ? 4 Appel à projets GT-AIMS – Groupes Thématiques AIMS - Comment les concepts d’Anthropocène et de limites planétaires sont-ils appropriés par les organisations pour penser et gérer les incertitudes futures ? - Quelle place est laissée à l’ambiguïté dans la représentation du risque ? - Comment l’imagination est-elle utilisée dans les organisations pour penser les risques et incertitudes ? - Comment certaines pratiques (communicationnelles, sociales, matérielles) influencent-elles les représentations du risque ? - Comment ces différents éléments s’imbriquent-ils dans des processus de « sensemaking prospectifs » ? - Quelles dynamiques relationnelles et de pouvoir émergent de l’impératif de gérer les risques ? Thème 2 : La gestion des risques et des crises à l’épreuve des temporalités et spatialités multiples D’une part, la gestion des risques doit penser les incertitudes climatiques, humanitaires, politiques ou encore technologiques – et se projeter dans plusieurs décennies en prenant les décisions qui permettraient d’éviter, d’atténuer ou de vivre avec les aléas du futur. D’autre part, les organisations et leurs modes de management sont façonnés par une histoire, une culture, les crises vécues, qui s’imposent parfois aux acteurs. La manière dont les incertitudes passées ont été « mises en risque » (Zinn, 2009) fait partie de cet héritage et laisse des traces matérielles, cognitives et relationnelles. En sus de l’héritage du passé et de la projection vers le futur, les organisations doivent également composer avec des horizons temporels différents entre mondes politique, industriel et scientifique. Ces différents horizons temporels ne sont pas sans conséquence quant à leur capacité à affronter des risques qui prennent aujourd’hui des formes différentes de ce que l’on imaginait hier (risques de souveraineté, d’approvisionnement, de compétitivité, mais aussi climatiques), ce qui amène à composer avec des savoirs et des compétences perdues ou en jachères. Par exemple, le rapport publié en mars 2023 de la commission d’enquête parlementaire « visant à établir les raisons de la perte de souveraineté et d’indépendance énergétique de la France » dont les conclusions dénoncent la « lente dérive » met en exergue et une projection défaillante vers un futur (politique et technologique) et remettent en lumière la question de l’articulation entre risque, incertitude et temps long, qu’ils soient passés ou futurs. - Comment s’articule la centralisation des connaissances (et son stockage) avec une approche collective de la connaissance ? Quels sont les supports organisationnels à ces deux approches de la connaissance ? - Quelle place est laissée à l’oubli organisationnel, entre un oubli choisi et un oubli subi ? - Comment les acteurs peuvent-ils orienter leurs pratiques temporaires de réponse à un incident dans une perspective long terme ? - Comment intégrer durablement le travail de mémoire dans l’apprentissage post-catastrophe ? - Comment les crises passées nous aident-elles à repenser les modalités d’actions organisationnelles futures ? (rapport à l’espace, stratégie collective de réponses) 5 Appel à projets GT-AIMS – Groupes Thématiques AIMS Thème 3 : Risques et nouvelles technologies Le développement de nouvelles technologies dont l’évolution et les impacts semblent de plus en plus échapper à nos sociétés, constitue également un champ de réflexion porteur (Ciborra, 2006 ; Rasmussen, 2006 ; Fleming, 2018). En particulier, l’incertitude inhérente à l’intelligence artificielle et ses multiples déclinaisons interroge la capacité des individus, des organisations, et plus largement des institutions, à « mettre en gestion » les menaces - mais aussi les opportunités - technologiques présents et à venir (Af Malmborg, 2022). Dans un tel contexte, comment construire des organisations et une société « résiliente » (van der Vegt et al. 2015), et quels rôles peuvent jouer les technologies dans la gestion de cette résilience, semblent des questions cruciales dont peuvent s’emparer les académiques. Au-delà de la capacité à anticiper, intégrer et contrôler de nouvelles incertitudes, ces nouvelles technologies suscitent de nombreux débats quant au cadre régulatoire adéquat et à la place de l’éthique (Butcher, 2019; Floridi et al, 2018; Af Malmborg, 2022). Prônant la transparence, la régulation qui se dessine fait écho au paradigme dominant le management de la sécurité dans les activités à risque en France au tournant des années 2000 (Vuarin et Steyer, 2023), « organisé autour des questions de responsabilité – (que celle-ci soit revendiquée ou attribuée), de l'affirmation du pouvoir de la science et des techniques, et de l'efficacité (voire de la vertu) de la règle au sens quasi-juridique du terme » (Gilbert et al., 2007, p.963). Or, l’étude des organisations opérant des activités à risque a montré que cette stratégie, visant à la maîtrise totale des risques, s’inscrit en faux par rapport à ce qu’il se passe, en pratique, au sein des organisations (Gilbert et al., 2007). Plusieurs axes de questionnements s’ouvrent alors : - Comment dépasser la traditionnelle opposition « menace-opportunité » dans l’appréhension des incertitudes liées aux nouvelles technologies ? - En quoi les nouvelles technologies (intelligence artificielle, big data, blockchain, etc.) modifient-elles le rapport de nos sociétés et de nos organisations au risque ? - Comment ces nouvelles technologies émergent-elles en tant qu’« objet-risque » ? Par quels processus et quelles pratiques les institutions et organisations les construisent-elles en tant que risque ? - Ces technologies font-elles émerger de nouveaux modes d’organisation, rapports sociaux et rapports de pouvoir ? - Quels paradigmes en matière de gouvernance, de responsabilité et d’éthique du risque se dégagent ? Quelle vision de l’organisation est portée par ces paradigmes, et incorporée par les technologies de l’IA ?